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France, pour délaisser ainsi la succession de son Descartes ? Elle avait cessé de s’occuper du moi, ou de l’homme individu, de l’homme abstrait, pour s’éprendre du nous, ou de l’humanité. Elle travaillait à fonder la doctrine qui sauvera le monde, la doctrine de la perfectibilité. ce n’est pas ici le lieu de démontrer ce que nous avons prouvé ailleurs, que la doctrine de la perfectibilité a ses racines et son siège en France dès le dix-septième siècle ; que le dix-huitième siècle, qui finit par elle, commence aussi par elle ; que sur les confins des deux siècles, en un mot, cette doctrine est venue se poser, et que c’est elle qui, donnant aux hommes une révélation toute nouvelle de leur existence, un sentiment nouveau de leurs forces, une appréciation nouvelle de leur destinée, a créé cette ère remarquable que l’on a nommée le dix-huitième siècle. Si donc la France, après avoir ouvert la route du rationalisme solitaire, ou de la psychologie, par Descartes, s’en est retirée, pour en prendre une autre, cela est un bonheur pour l’humanité. Il fallait que la recherche sur la nature abstraite de l’esprit humain fût continuée, sans doute ; aussi l’a-t-elle été par d’autres peuples. Mais il fallait aussi qu’une carrière nouvelle fût tentée ; il fallait