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SAINT-JUST

notre Révolution, il restera, du moins, qu’elle fut « une école d’énergie[1] » et il suffit à la mémoire de Saint-Just, pour la préserver de toute banalité, de s’être identifié à cette crise jusqu’à l’incomparable, avec un luxe inouï de prédestination. Il arrive neuf et n’a qu’un usage : tyranniser. À vingt ans, il connaît tous les secrets des dominateurs : il sait vouloir, fournir plus d’activité que les autres, il sait se tenir, commander et se taire. On l’a jugé dédaigneux, sans doute parce que les hommes ont leurs raisons de croire la hauteur faite, avant tout, pour les mépriser.

Maintenant, fut-il très intelligent ? L’intelligence est un mot si souple, si peu ramené au système métrique… Il y a de grandes niaiseries dans l’œuvre de Saint-Just. Ses Institutions, ses projets de Constitution, sont parfois très près de l’enfance. Mais cela ne doit pas faire illusion car certaines phrases, à leur tour, sont si fines et si réfléchies qu’elles sont vraiment de la pensée et la pensée d’un homme très distingué. Aujourd’hui nous exigeons de l’intelligence d’autres attitudes, toutefois Saint-Just s’est assimilé les idées de son temps, il les a exploitées, à tout le moins, avec une

  1. M. Rémy de Gourmont.