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SAINT-JUST ET ROBESPIERRE

Just nulle intervention, nulle mention au procès-verbal ou dans les journaux. Était-il présent ? Cette incroyable abstention est la raison, sans doute, qui fit croire à tant d’historiens qu’il n’était pas encore arrivé de l’armée, que Robespierre ne l’attendait que dans la nuit. Or, Saint-Just fut au Comité en même temps que les courriers de Fleurus (11 messidor) ; il devança l’estafette de Jourdan.

Le 9, pendant ces quatre heures de séance où Barras le voit rougir et pâlir alternativement, il assiste à la catastrophe de Robespierre, à la sienne, sans un mot, un geste :

Saint-Just, depuis qu’il était monté à la tribune ne l’avait point quittée, malgré l’interruption qui en aurait précipité tout autre. Il était seulement descendu de quelques degrés, puis il y était remonté pour reprendre fièrement son discours ; il n’avait pu ajouter un mot aux deux seuls qu’il avait fait d’abord entendre ; immobile, impassible, inébranlable, il semblait tout défier par son sang-froid ; lorsque le terrible décret d’accusation fut prononcé, il fallut bien changer d’attitude[1].

Ne fut-ce que du dédain ? n’y eut-il pas une volonté d’isolement dans cette allure singulière ?

  1. Barras, Mémoires.