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SAINT-JUST

chose au-dessus des « pouvoirs illimités », ce fut des « pouvoirs extraordinaires ».

La manière est célèbre, ses arrêtés et ses réquisitions furent cruels. C’est l’époque où dans son enthousiasme le citoyen Gatteau, compatriote de Saint-Just et qui le suit dans ses missions, celui-là même dont le cachet est gravé d’une guillotine, écrit à un ami :

La bienfaisante Terreur produit ici d’une manière miraculeuse ce qu’on ne pouvait espérer d’un siècle au moins par la raison et la philosophie. Quel maître-bougre que ce garçon-là ! La collection de ses arrêtés sera sans contredit un des plus beaux monuments historiques de la révolution.

On a attaché beaucoup d’importance à ce fait que Saint-Just n’ordonna pas une exécution capitale. Il s’est même inquiété des abus de la Propagande, secte de jeunes patriotes choisis et respectés comme une caste sainte — ils avaient une garde d’honneur — ordonna qu’aucun mandat d’arrêt ne recevrait d’exécution avant que Lebas ou lui aient examiné les pièces. Mais si la cruauté de Saint-Just ne s’affola jamais, ne fut jamais arbitraire — encore n’est-ce pas très sûr en ce qui concerne les derniers mois — s’il appliqua seulement avec rigueur la loi cruelle, on échouera cependant à le réhabiliter par la mansuétude.