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SAINT-JUST

l’état malheureux des affaires et l’importance des opérations ne compensent à Saint-Just l’effort de quitter Paris. Il revient comme la foudre et part avec toutes les lenteurs. Excepté cependant à la veille de Fleurus où, rappelé de tout le Comité, il se fait attendre, mais pour fondre sur eux après le pensum de sa victoire et ne les plus quitter jusqu’à thermidor. Il a senti le danger de ces absences et, dans cette partie fort belle de sa vie, il faut lui savoir gré de s’être compromis plus qu’un autre.

Les missions de Saint-Just sont bien connues. Celle de l’Alsace aboutit à Wissembourg et Landau, la mission de la Sambre à Charleroi et Fleurus. Devant l’immense résultat on n’ose le rapporter à un homme et pourtant, chaque fois, c’est à l’arrivée de Saint-Just que tout change, tout passe du désarroi honteux au succès décisif :

Quand nous arrivâmes, écrit Saint-Just aux Jacobins de Strasbourg qui ne lui pardonnèrent jamais ses mesures, l’armée semblait désespérée, elle était sans vivres, sans vêtements, sans discipline, sans chefs ; il ne régnait dans la ville aucune police ; le pauvre peuple y gémissait sous le joug des riches dont l’aristocratie et l’opulence avaient fait son malheur en dépréciant la monnaie nationale et en disputant à l’enchère les denrées à l’homme indigent.