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La bataille dura de l’aube jusqu’au soir ;
Et, surpris dans leur vol, de riches scarabées,
De larges papillons jaunes striés de noir
Se traînèrent mourants parmi les fleurs tombées.

La rivière était rouge : elle roulait du sang.
Le bleu martin-pêcheur en souilla son plumage ;
Et le saule penché, le bouleau frémissant,
Essayèrent en vain d’y trouver leur image.

Le biez du Moulin-Neuf en resta noir longtemps.
Le sol fut piétiné, des ornières creusées.
Et l’on vit des bourbiers sinistres, miroitants
Où les troupes s’étaient hardiment écrasées.




Et lorsque la bataille eut apaisé son bruit,
La lune, qui montait derrière les collines,
Contempla tristement, vers l’heure de minuit,
Ce que l’œuvre d’un jour peut faire de ruines :

Pris du même sommeil, là gisaient par milliers,
Sur les canons éteints, les bannières froissées,
Épars confusément, chevaux et cavaliers
Dont les yeux grands ouverts n’avaient plus de pensées.