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LA PRUDENCE DU VEUF

Monologue
par Eugène LEMERCIER




C’était un excellent ménage.
Mariés depuis fort longtemps,
Donc tous les deux d’un certain âge,
Ils vivaient unis et contents.

Quand, pour troubler son existence,
Ce couple, plein de gravité,
S’en fut — oh ! par inadvertance ! —
Dans un dancing, prendre le thé.

Inconséquence sans pareille,
Car toute femme a, dans le cœur,
Une danseuse qui sommeille,
A dit — à peu près — un auteur.

Vous devinez quel trouble d’âme,
Oui, quel vertige éberlua
La bien pensante et noble dame
Quand le jazz-band tonitrua.

Elle sentit revivre, en elle,
De vieux souvenirs endormis,
Elle eut du feu dans la prunelle
Et, dans les jambes, des fourmis.

Et, dès lors, elle aima la danse
Au point d’en perdre la raison,
Et ne marcha plus qu’en cadence
Dans la rue et dans la maison.

— Maudit dancing ! Elle m’assomme !
Disait l’époux, quel vertigo !
Je ne peux plus dormir mon somme
Sans entendre quelque tango !



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