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o nata mecum

Chansons et baisers ? amoureuses rixes ?
Contes et gabets d’ivrognes prolixes ?
Propos saupoudrés de gros sel latin ?

Mécène est chez moi : le moment est grave.
Viens, chère bouteille, et quitte la cave
Où tu mûrissais loin de tout regard.
Ton vin a perdu son bouquet trop rude,
Et coule tout plein de mansuétude
Comme les discours d’un calme vieillard.

Mécène, imprégné de sagesse antique,
N’a point de mépris pour le vieux massique.
Moins en eut encor l’austère Caton :
Chez nos bons aïeux sa vertu prônée,
Parfois rougeoyante, émerillonnée,
Au combat des pots s’échauffa, dit-on.

Ouvre, ô vin disert, les âmes des sages !
Qu’est l’argent poli ? Miroir des visages.
Et le vin vermeil ? Miroir des esprits.
(La comparaison est de source grecque.)
Sois frais au gosier comme une pastèque,
Et plus chaud au cœur qu’un baiser surpris !