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a le monde des hommes de lettres et des artistes, et le monde des financiers, et le monde de la haute bourgeoisie, et le monde académique, et le demi-monde, non pas au sens où on l’entend à présent, mais tel que l’a défini M. Alexandre Dumas fils. Surtout il y a de multiples combinaisons de ces mondes divers.

Dès lors, qu’arrive-t-il ? Les personnes du monde qui était autrefois le vrai monde sont portées à croire que les peintures qu’on nous fait des mœurs mondaines ne ressemblent pas. Je demandais à une d’elles : « Moi, je ne sais rien ; mais vous qui savez, voyons, l’Aventure de Mlle de Saint-Alais, par exemple, est-ce que c’est cela, le monde ? — Mais pas du tout, me fut-il répondu. Où ce monsieur a-t-il rencontré de pareilles jeunes filles ? » Ce qui n’a pas empêché, d’autre part, M. Octave Feuillet de nous avertir que les jeunes filles du plus noble des faubourgs tiennent entre elles des propos « à faire rougir des singes ». À qui donc se fier ?

Tous ont raison sans doute. C’est un certain ensemble d’habitudes et une certaine manière de vivre qui constitue le monde. C’est aussi la richesse. Il s’agirait de fixer ce qu’il faut de revenu à un homme intelligent et bien élevé pour commencer à être du monde, et ce qu’il en faut à un imbécile ou à un rustaud. L’écart serait grand entre les deux chiffres. On peut à la rigueur être du monde, du moins en passant, quand on a un habit noir. On peut toujours et sûrement en être quand on a trois cent mille francs de