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tremblante, l’ouvre, jette un coup d’œil sur celle de M. de Pontverre, revient à la mienne, qu’elle lit tout entière, et qu’elle eût relue encore si son laquais ne l’eût avertie qu’il était temps d’entrer. Eh ! mon enfant, me dit-elle d’un ton qui me fit tressaillir, vous voilà courant le pays bien jeune, c’est dommage en vérité. Puis, sans attendre ma réponse, elle ajouta : Allez chez moi m’attendre ; dites qu’on vous donne à déjeuner ; après la messe, j’irai causer avec vous.

Et un peu plus loin :

Elle avait de ces beautés qui se conservent, parce qu’elles sont plus dans la physionomie que dans les traits ; aussi la sienne était-elle encore dans tout son premier éclat. Elle avait un air caressant et tendre, un regard très doux, un sourire angélique, une bouche à la mesure de la mienne (Jean-Jacques avait la bouche petite), des cheveux cendrés d’une beauté peu commune, et auxquels elle donnait un tour négligé qui la rendait très piquante.

Et les lignes qui suivent nous font comprendre qu’elle était boulotte.

Les pages où Jean-Jacques nous raconte que madame de Warens lui propose de se donner à lui pour le sauver des périls de son âge (il avait vingt-deux ans et elle trente-quatre) et qu’elle lui explique cela gravement et posément, et qu’elle lui laisse huit jours pour répondre, et qu’il accepte sans grand plaisir et surtout par reconnaissance, en continuant d’appeler sa maîtresse « maman », et qu’il découvre un jour qu’il a le jardinier Claude Anet pour collaborateur, et qu’il l’admet sans résistance, et que ma-