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— M. Gustave Lanson a été plus heureux. Vous devez lire, dans son histoire de la Littérature française, son chapitre sur Rousseau, si vous aimez Rousseau avec intransigeance, et si vous désirez croire à la cohérence et à l’unité de son œuvre, et à sa bienfaisance inépuisée. Cette étude est d’ailleurs un modèle d’interprétation subtile et d’ingénieuse reconstruction.

Je ne puis vous la remettre sous les yeux ; mais un manuel à l’usage des lycées se trouve résumer ainsi le résumé de M. Lanson :

Système de Rousseau. — 1º L’état de nature est bon, l’état social est mauvais, — voilà la thèse. — 2º Mais on ne peut revenir à l’état de nature, il faut donc se résigner à l’état social comme à un pis-aller nécessaire, — voilà l’antithèse. — 3º D’ailleurs on peut améliorer l’état social en le rapprochant, par divers moyens, de l’état de nature, — voilà la synthèse.

Dès lors on aperçoit comment le développement du premier et du troisième point se distribue entre ses œuvres. — La bonté de l’état de nature et les vices de l’état social, voilà le sujet des deux Discours et de la Lettre à d’Alembert. — Remédier aux maux de l’état social pour l’individu par une éducation conforme à la nature, voilà le sujet de l’Émile ; — y remédier pour l’homme en famille par la pratique des vertus de la famille selon la nature, qui sont capables de purger les passions mondaines des deux sexes, voilà le sujet de la Nouvelle Héloïse ; — y remédier enfin, pour les hommes soumis à un gouvernement, par l’observation loyale des conditions qu’ils mirent jadis à cette soumission et que leur dicta la nature (paraît-il), voilà le sujet du Contrat social.