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il faut seulement les distraire de faire le mal ; il faut les occuper à des niaiseries pour les détourner des mauvaises actions.

Et enfin :

Il est très essentiel de se servir aujourd’hui des sciences et des lettres comme d’une médecine au mal qu’elles ont causé, ou comme de ces animaux qu’il faut écraser sur la morsure.

Allons ! on peut s’entendre. Et Jean-Jacques peut, en toute sûreté de conscience, continuer à faire de petites comédies et de petits opéras.

Narcisse ou l’amoureux de soi-même est un marivaudage insignifiant. — Le Devin du Village, beaucoup meilleur, et surtout par la musique, — où l’on voit un vieux paysan, qui passe pour sorcier, enseigner à Colette le moyen de reprendre Colin en excitant sa jalousie, — est une paysannerie enrubannée à laquelle ressembleront beaucoup les petits opéras comiques de Favart. On ne conçoit pas bien, à la vérité, en quoi ce joli spectacle, à la fois très factice et assez voluptueux, avec sa musique tendre et ses danses de villageoises de théâtre, peut remédier aux maux affreux causés par la science et les arts. Mais il est certain que le succès du Devin a été une des grandes joies de Rousseau.

Le Devin fut joué d’abord en 1752, à Fontainebleau, devant la cour. Les huit ou dix pages des Confessions où notre sauvage nous raconte cette représentation respirent à chaque ligne l’ivresse