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il démontre et répète que la morale du christianisme est supérieure, mais ici il ne s’agit pas de morale, il s’agit de beauté. Il dit aussi (et cela est plus important pour la poésie et l’art) que le christianisme, « en se mêlant aux affections de l’âme, a multiplié les ressorts dramatiques » ; que la religion chrétienne « connaît mieux les mystères du cœur humain » et qu’elle est « un vent céleste qui enfle les voiles de la vertu et multiplie les orages de la conscience autour du vice ». Cela reste d’ailleurs assez superficiel, et il ne paraît pas que Chateaubriand ait quelque part défini un peu profondément en quoi le christianisme a compliqué et enrichi la conscience et la vie intérieure. Mais, encore une fois, il s’agit de beauté (du moins on nous l’avait dit) ; et, sur ce point, il s’en faut que l’auteur établisse la supériorité de la poésie moderne, arrêtée à la fin du dix-huitième siècle.

Il affirme ensuite que « les anciens n’avaient point de poésie proprement descriptive », parce que « la mythologie rapetissait la nature ». (Mais c’est plutôt que les anciens ne décrivaient pas pour décrire, ne décrivaient pas sans raison.) Puis il entreprend de démontrer que, dans ce qu’on appelle le « merveilleux », la religion chrétienne le dispute en beauté à la mythologie même. Et ce sont alors les comparaisons les plus vaines entre les faunes ou les naïades et les anges ou les saints ; entre le Zeus d’Homère et le Dieu de Racine ; le songe d’Énée et le songe d’Athalie ; le Tartare et