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— Comptez sur moi, reprit Guise, non seulement pour l’action, mais pour ce qui doit suivre l’action. Un pacte me lie à chacun de vous ; je le tiendrai religieusement. Je vous donne licence pour promettre à chacun de vos affidés ce qui lui conviendra le mieux selon son ambition et selon l’aide qu’il nous peut apporter : je tiendrai vos promesses. Les temps sont proches. Vous recevrez le mot d’ordre. D’ici là, que chacun reprenne ses occupations ordinaires. Maintenant, messieurs, séparons-nous. Moins nous serons ensemble, moins il sera possible de nous soupçonner.

Alors, tous, l’un après l’autre, vinrent baiser la main de Guise, hommage royal que le jeune duc accepta comme une chose vraiment naturelle.

Puis ils sortirent, en s’espaçant de quelques minutes.

Henri de Guise et le cardinal de Lorraine, les premiers, passèrent dans le cabinet noir.

Cosseins tira les verrous de la porte qui donnait dans l’allée.

À l’autre bout de l’allée, Lubin était toujours en sentinelle.

Puis ce furent Cosseins, Tavannes et l’évêque ensemble.

Puis l’ancien prévôt Marcel sortit avec le gouverneur de la Bastille, Guitalens.

Enfin, Henri de Montmorency, demeuré seul, s’éloigna à son tour.

Alors, la trappe de la cave se souleva, et la tête de Pardaillan apparut. Le chevalier était un peu pâle de ce qu’il venait de voir et d’entendre. C’était un formidable secret qu’il venait de surprendre, un de ces secrets qui tuent sans rémission. Et Pardaillan, qui n’eût pas tremblé devant dix truands, Pardaillan, qui avait tenu tête à un peuple déchaîné, Pardaillan, qui, avec un sourire, avait risqué de s’ensevelir sous l’écroulement d’une maison, Pardaillan frissonna de se sentir maître — ou l’esclave ! — d’un tel secret. Il plia les épaules comme un athlète qui reçoit tout à coup un coup trop rude. Et il envisagea l’effrayante solution.

Ou le duc de Guise apprendrait que la scène de la Devinière avait eu un témoin.

Et dès lors, ce témoin était un homme mort ! Pardaillan ne redoutait pas la mort vue face à face, une bonne lame au poing. Mais ce qu’il redoutait, c’était de vivre désormais en compagnie de cet hôte sinistre qui s’appelle l’Épouvante ! Chaque coin de rue allait lui être un guet-apens ! Chaque borne allait être une embuscade ! Le pain qu’il mangerait contiendrait l’un de ces poisons implacables que Catherine de Médicis avait rapportés d’Italie ! Plus de libre vagabondage ! Plus de franche lippée : la mort partout, la mort sournoise, lâche, et qui guette dans l’ombre !

Ou bien Guise et les conjurés ne sauraient rien…

Et alors, que faire ? Devait-il assister, spectateur impuissant, à la tragédie qui se préparait ? Non ! mille fois non ! Une