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plus ou moins éloignée dans l’avenir, de l’âme humaine par les poètes régénérés. Je crains que vous ne fassiez là, Monsieur, un rêve irréalisable, qui doit tenir à vos origines orientales et à vos idées personnelles en matière religieuse. Cette éducation par les poètes pouvait peut-être se justifier quand les rapports du ciel et de la terre étaient dans d’autres conditions qu’aujourd’hui, quand les Dieux quittaient à chaque instant l’Olympe pour avoir commerce avec les hommes et quelquefois avec les femmes ; quand Athéné, fille de Zeus tempétueux, saisissait le Péleion, visible pour lui seul, et lui parlait au milieu des batailles, quand Diane se tenait à la disposition d’Endymion et que Junon, Minerve et Vénus acceptaient, dans une question purement plastique, d’ailleurs, l’arbitrage d’un simple berger, qui en devenait audacieux jusqu’à susciter les catastrophes qu’Homère a si bien chantées et que vous avez si bien traduites. La morale que les poètes initiés à ces mystères divins pouvaient enseigner aux hommes était assez faite d’imagination et d’opportunité, pour que les poèmes lyriques et dramatiques y fussent suffisants. Mais depuis Valmiki et Homère, un fait extraordinaire et imprévu, quoique prédit, a eu lieu. Au milieu des poèmes orphiques et védiques, tout à coup on a vu tomber, du ciel, dit-on, un petit livre, un tout petit livre, dont le contenu ne remplirait pas un chant de l’Iliade ou du Rounal’ana ; et ce petit livre racontait aux hommes la plus merveilleuse histoire