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Une telle profession de foi n’était pas seulement le coup de clairon qui sonne l’assaut de l’avenir, c’était le coup de cloche qui sonne le glas du passé et surtout du présent. C’était une révolution radicale devant entraîner de bien autres conséquences que celle de 1830. Il ne s’agissait de rien moins en effet que de répudier toute l’esthétique moderne, de revenir sur le mouvement classique et romantique, et de restituer aux poètes la direction de l’âme humaine. Après avoir eu connaissance de vos vers, Victor Hugo a-t-il eu connaissance de cette préface ?Je le crois. Aussi a-t-il voulu vous connaître et vous séduire. Se faire un apôtre d’un adversaire, c’est régal de Dieu. Sachant que vous ne viendriez pas à lui le premier, il est allé à vous. Il vous a envoyé un de ses livres, avec ces deux seuls mots tout caressants d’égalité : Jungamus dextras, et sa grande signature royale. N’était-il pas celui qui avait dit : Maintenant je sais l’art d’apprivoiser les âmes. Vous êtes venu ! vous avez vu ! vous avez été vaincu ! A partir de ce moment, vous avez senti que vous ne pouviez plus résister à cet enchanteur, et vous êtes resté un des fidèles de la maison, un des fervents du maître. Vous avez bien fait. Pour quiconque est un peu poète Victor Hugo est irrésistible. Je viens de le relire, depuis les Odes et Ballades jusqu’à la Fin de Satan et jusqu’au Théâtre en liberté. J’ai retrouvé partout les éblouissements qu’il m’avait