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les vivres et les munitions, et détruire ce que l’on ne pouvait emporter.

Quel spectacle lamentable, tout le long de la route que nous venions de parcourir, cela sent la désorganisation et la déroute : des canons abandonnés, des armes, des munitions, des vivres, des effets, le tout semé sur le parcours que nous venions d’effectuer ; ajoutez à cela l’attitude morne, triste des habitants qui nous regardaient défiler.

On nous annonce avant de nous remettre en marche que nous allons vers St-Gérard rejoindre les Français et former avec nos amis alliés l’armée de Sambre et Meuse !

Cela ranime le courage des hommes et les hauteurs de Malonne sont escaladées à bonne allure aux accents d’une vibrante « Marseillaise » chantée à pleins poumons. Quelques paroles de ce chant mâle et énergique avaient suffit pour nous mettre du « cœur au ventre », nous rendre confiance et imprimer sur nos figures un air héroïque. Mais hélas, il fallut bientôt déchanter, la colonne sans flanc-garde, non protégée, sans guide, devait, véritable fleuve humain, balloter entre les lignes allemandes, errer toute la nuit, aller de l’avant, revenir sur ses pas, prenant parfois pour guides quelques rares paysans fuyant l’envahisseur, emportant quelques maigres bagages, pour finir par marquer le pas plusieurs heures dans un défilé avant d’arriver à Bioulx.