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LOIN DE LA PATRIE.


La mort d’un brave.

Lorsque je pénétrai dans l’atelier transformé en hôpital, de nombreux malades étaient couchés sur un peu de paille humide. Dans un coin, on m’indique une forme sombre et inerte. Je m’approche et je reconnais un brave petit gars de ma compagnie qui avait sollicité des autorités allemandes l’autorisation de me voir.

Toujours, je verrai ce brave faire un effort surhumain pour se relever et me tendre la main, ses joues émaciées se colorer, ses yeux ternes déjà, refléter en me voyant une flamme de plaisir, comme si le plaisir pouvait encore exister pour cette loque humaine en train de lutter contre la mort.

Sans amis sur la terre ennemie, notre camarade se sentant mourir, avait mandé auprès de lui un compatriote dont il fut sûr, afin de lui dicter ses dernières volontés et de le charger de porter un dernier souvenir à sa bonne vieille maman qui l’attend tout là-bas dans un petit coin de notre riche et riante Wallonie, aujourd’hui dévastée et endeuillée.