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tin, dans l’hôtel même, une exposition des meubles et objets qui devaient se vendre à la salle Drouot. Meubles modernes et de goût médiocre, objets sans valeur artistique… mais au centre de la pièce, sur un socle tendu de velours grenat, protégée par un globe de verre, et gardée par deux agents, étincelait la bague au diamant bleu.

Diamant magnifique, énorme, d’une pureté incomparable, et de ce bleu indéfini que l’eau claire prend au ciel qu’il reflète, de ce bleu que l’on devine dans la blancheur du linge. On admirait, on s’extasiait… et l’on regardait avec effroi la chambre de la victime, l’endroit où gisait le cadavre, le parquet démuni de son tapis ensanglanté, et les murs surtout, les murs infranchissables au travers desquels avait passé la criminelle. On s’assurait que le marbre de la cheminée ne basculait pas, que telle moulure de la glace ne cachait pas un ressort destiné à la faire pivoter. On imaginait des trous béants, des orifices de tunnel, des communications avec les égouts, avec les catacombes…

La vente du diamant bleu eut lieu à l’hôtel Drouot. La foule s’étouffait et la fièvre des enchères s’exaspéra jusqu’à la folie.

Il y avait là le Tout-Paris des grandes occasions, tous ceux qui achètent et tous ceux qui veulent faire croire qu’ils peuvent acheter, des boursiers, des artistes, des dames de tous les mondes, deux ministres, un ténor italien, un roi en exil qui, pour consolider son crédit, se donna le luxe de pousser, avec beaucoup d’aplomb et une voix vibrante, jusqu’à cent mille francs. Cent mille francs ! Il pouvait les offrir sans se