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ARMELLE ET CLAUDE

aime au lieu de s’acharner à la contrarier ? Pourquoi ne pas le laisser libre de ses pensées et de ses actes ? Si d’autres lèvres lui plaisent, pourquoi bouder ? S’il les prend, pourquoi bondir de rage ? Pourquoi le priver d’une joie qui ne nous retire rien ?… Mais ce n’est pas possible. Il semble que l’on n’aime pas si l’on reste sage, si l’on est maître de soi. Il semble que l’amour, c’est quelque chose de dément, de fou, de désorbité, d’épileptique. Il faut que ça ait des allures de torrent. Les preuves d’amour ne sont pas la bonté, le pardon, la tendresse, mais la jalousie, les querelles, les soupçons, les exigences. Au lieu d’un amour amical, c’est un amour hostile, haineux, farouche, hypocrite.

Il leva la main en guise de serment :

— Je n’aimerai plus ainsi…, je ne veux plus de cet amour avilissant.

— Et cependant, fit-elle, vous m’en chantiez les mérites l’autre soir.

— C’est que le poison est dans mes veines. L’amour devient, pour peu qu’on soit