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les mille nuits et une nuit

peine l’eut-elle porté à ses lèvres qu’elle jeta un grand cri et tomba à la renverse… Elle avait deviné la main de son fils Hassan.

Alors le vizir, ainsi que tout le monde, fut dans la stupeur, et on se hâta de jeter de l’eau de roses au visage de la grand’mère qui, au bout d’une heure, finit par revenir à elle. Et elle dit : « Allah ! l’auteur de ce plat à la grenade ne peut être que mon fils Hassan Badreddine, et pas un autre ! J’en suis sûre ! Il y a que moi seule qui sache l’apprêter de cette façon, et c’est moi qui l’ai appris à Hassan ! »

À ces paroles, le vizir fut au comble de la joie et de l’impatience de revoir son neveu et s’écria : « Allah va enfin permettre notre réunion ! » Et aussitôt il fit venir ses serviteurs, réfléchit un instant, combina un projet, et leur dit : « Que vingt hommes d’entre vous autres aillent aussitôt à la boutique du pâtissier Hassan, connu dans le souk sous le nom de Hassan El-Bassri, et qu’ils ruinent cette boutique de fond en comble ! Quant au pâtissier, qu’on lui attache les bras avec la toile de son turban, et qu’on me l’amène ici de force, mais en prenant bien garde de lui faire le moindre mal. Allez ! »

Quant au vizir, il monta immédiatement à cheval, après s’être muni des lettres écrites par le sultan d’Égypte, et se rendit à la maison du gouvernement, le Dâr El-Salam, chez le lieutenant-gouverneur qui représentait à Damas le sultan d’Égypte, son maître ! Arrivé à Dâr El-Salam le vizir communiqua les lettres du sultan au lieutenant-gouverneur, qui aussitôt s’inclina et les embrassa avec respect et les porta à sa tête avec vénération. Puis il s’adressa au