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miers vont devant, pour dire, que Les plus diligents ont tousjours de l’avantage. Il va comme on le meine, pour dire, Il n’est pas capable de prendre une resolution de luy-mesme. Cela va tout seul, pour dire, qu’Une affaire ne reçoit point de difficulté. Cela va comme il plaist à Dieu, pour faire entendre, qu’Une affaire est negligée, que l’on n’en prend aucun soin. Cela s’en va sans dire, pour marquer une chose que l’on suppose certaine, & qui n’a pas besoin d’estre exprimée. Il s’en est allé comme il est venu, pour dire, Il n’a rien fait de ce qu’il vouloit ou devoit faire. Tout s’en est allé en fumée, pour dire, qu’On n’a pas réüssi. Tout y va la paille & le bled, pour dire, qu’On n’y a rien espargné. Il n’y va pas de main morte, pour dire, Il frappe rudement. Il y employe tout ce qui dépend de luy.

Aller, est quelquefois subst. m. Ainsi on dit, Au long aller petit fardeau pése, pour marquer qu’Il n’y a point de charge si legere qui ne devienne fascheuse à la longue : Et qu’Un homme a eu l’aller pour le venir, pour dire, qu’Il n’a rien fait de ce qu’il prétendoit faire où il estoit allé, qu’il a fait un voyage inutile.

On dit aussi au subst. Le pis aller, pour dire, Le pis qu’il puisse arriver. Le moindre advantage qu’on puisse avoir ; mais il ne s’employe guere qu’avec les pronoms personnels. S’il ne peut espouser cette fille-là, son pis aller sera de demeurer comme il est. Si vous ne trouvez mieux, je seray vostre pis aller.

On dit adverbialement, Au pis aller, pour marquer Le plus grand mal ou le moindre advantage qui puisse arriver de quelque chose. Quand son pere le desheritera, au pis aller il aura encore le bien de sa mere. au pis aller, il en sera quitte pour une amende.

ALLEU. s. m. Il n’a d’usage qu’avec le mot Franc, Franc-alleu ; & il se dit de Tout fonds de terre, soit noble ou roturier, qui est exempt de tous droits Seigneuriaux. Toutes ces terres sont des francs-alleus. tenir en franc-alleu.

ALLEURE. s. f. (On prononce allûre) Desmarche, façon de marcher. Contrefaire son alleure, je le connus à son alleure. cette haquenée a une alleure fort douce.

En ce sens, il n’a d’usage au pluriel qu’en parlant Des chevaux. Ce cheval, cette haquenée a les alleures belles, de belles alleures. Mais fig. il se dit, De la maniere dont un homme se conduit dans une affaire. J’ay reconnu ses alleures.

Alleure, Signifie aussi, Sorte de voiture. L’alleure d’une berline est plus douce que celle du carrosse

ALLIAGE. s. m. Meslange de deux metaux ensemble. Les monnoyeurs doivent faire l’alliage selon l’Ordonnance. le cuivre sert d’alliage à l’or. il y a plus d’alliage dans les pistolles que dans les escus d’or.

ALLIANCE. s. f. Union par mariage. Il a fait une grande alliance en mariant sa fille à un Duc & Pair. ces Maisons sont jointes par plusieurs alliances.

Il se dit aussi de l’Union, de la confederation qui se fait entre des Estats pour leurs interests communs. Les Suisses ont une ancienne alliance avec la France.

ALLIER. v. a. Mesler, incorporer ensemble. Allier l’or avec l’argent.


En ce sens il est aussi n. p. Ces deux metaux ne s’allient point, ne peuvent s’allier ensemble.

Allier, à l’actif, fig. aussi, Joindre par mariage ; Et alors il s’employe ordinairement avec le pronom personnel. Il s’est allié en bon lieu. il veut se bien allier. s’allier à une bonne famille, avec une bonne famille. ces deux familles se sont alliées.

Il se dit aussi Des Princes & des Estats qui se liguent ensemble pour leurs communs interests. Ces deux Republiques s’allierent ensemble. ces deux Roys se sont alliez. c’est l’interest de leurs Estats qui les allie.

Allié, ée. part. Il a les significations de son verbe.

Il est aussi subst. Et alors il sign. Celuy qui est joint à un autre par affinité. Cet homme-là est mon allié. nos parents & nos alliez. nous ne sommes pas parents, nous ne sommes qu’alliez.

Il signifie aussi, Celuy qui est confederé. Le Roy a tousjours eu soin de secourir & d’assister ses alliez. ce Prince-là est allié de la Couronne. cette Republique est nostre alliée.

ALLIER. s. m. (Ce mot n’est que de deux syllabes.) Sorte de filet à prendre des perdrix. Il a pris tant de perdrix avec des alliers. Il est plus usité au pluriel qu’au singulier.

ALLODIAL, ALE. adj. Qui est en franc-alleu. Terres allodiales.

ALLONGE. s. f. Piece qu’on met à un habit, à un meuble pour l’allonger. Mettre une allonge à une juppe. il faut mettre une allonge à ces rideaux.

ALLONGEMENT. s. m. v. Augmentation de longueur, Ce qui est adjousté à la longueur de quelque chose. L’allongement d’un canal, d’un jardin, d’une allée, d’une avenuë.

Il se dit fig. Des lenteurs affectées & recherchées dans les affaires. C’est un homme qui cherche, qui trouve tousjours des allongements dans les affaires. ce ne sont qu’allongements.

ALLONGER. v. a. Faire qu’une chose soit plus longue, plus estenduë. Allonger une table. allonger une galerie. allonger un habit, une juppe. allonger des estriers. allonger le cou. allonger le bras. allonger les jambes.

Il signifie aussi, Faire durer davantage. Allonger le temps. allonger un procés. allonger une affaire. allonger le travail. allonger une procedure.

On dit, Allonger un coup d’espée. allonger une estocade, pour dire, Porter un coup d’espée, une estocade, en allongeant le bras.

On dit aussi fig. Allonger une estocade, allonger l’estocade, pour dire, Demander de l’argent à emprunter, sans estre en pouvoir ou en dessein de le rendre.

On dit fig. Allonger le parchemin, pour dire, Faire de longues escritures dans le dessein d’en tirer plus de profit. Tirer un procez en longueur par des formalitez & des chicanes.

On dit aussi fig. Allonger la courroye, pour dire, Porter les profits d’une Charge, d’un Employ plus loin qu’ils ne devroient aller communément. Cet employ ne luy vaudroit pas tant, s’il n’allongeoit un peu la courroye.

On s’en sert aussi pour dire, User d’une grande oeconomie dans la dépense. Il a une grande famille & peu de revenu, il faut qu’il allonge bien la courroye pour aller jusqu’au bout de l’année.

Allongé, ée. part.


Dict. de l’Ac. Fr. Tome I. G ij