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M. Le Myre de Vilers, voue à cette partie de sa tâche plus de sollicitude encore que ses prédécesseurs. Ceux-là qui suivent le mouvement géographique ont pu remarquer combien de fois les événements ont rendu précieuses des informations recueillies par des explorateurs dont les efforts avaient été naguère dé- daignés, pour ne rien dire de plus.

Depuis deux ans le gouvernement de notre riche Cochinchine fait procéder à une série d’explorations utiles pour la paix aussi bien que pour la guerre. Les résultats en sont consignés dans une série de notices! dont l’une nous apportait, à la fin de l’an dernier, une reconnaissance exécutée? dans le but de choisir le terrain le plus favorable pour l’établissement d’un chemin de fer entre Saigon et Phnom-Penh.

D'autre part, un capitaine d'infanterie de marine, M. Aymonier, déjà connu par de bons travaux sur la Cochinchine, s’est dirigé à l’ouest de notre frontière, sur Kompot; il a traversé la presqu'ile qui borde à l'est la baie de Compong-Som, puis, s’avançant dans la province de ce nom, il est revenu à l’est sur Oudong et Phnom-Penh, après avoir été le premier à parcourir cette région qui est accidentée et riche.

De son côté un médecin de la marine, le docteur Neïs, a fait trois voyages, dont le premier l’a conduit chez les Moïs de l’arrondissement de Baria, où il a recueilli de nombreuses informations ethnographi- ques et anthropologiques.

Un deuxième voyage a conduit le docteur Neïs jus- qu’au haut cours du Donnaï, qu'il a remonté et dont il a pour la première fois vu l’un des affluents de tête; la sauvagerie des indigènes La-Canh-Dong l’a empêché de visiter le bras le plus considérable du ileuve. « Là, dit M. Neïs dans une lettre au docteur Harmand, j'ai trouvé des montagnes fort élevées, for- mant une double chaîne séparée par un plateau que j'ai mis sept jours à traverser. »

A la suite de ces voyages, une tribu indigène d’un territoire voisin des frontières de notre Cochinchine ayant fait demander le protectorat de la France, le docteur Neïs se mit de nouveau en route, accompagné cette fois de M. Septans, lieutenant d'infanterie de marine. Il retourna sur le haut Donnaï, chargé de s’as- surer de la sincérité de ce désir des indigènes. Au cours de cette mission, il réussit à visiter la tribu des Traos, qui ne reçoit d'ordinaire aucuné tranger, même les hommes des tribus voisines. M. Neïs a suivi le Donnaï pas à pas, à travers le dédale des montagnes ‘où naît le fleuve, et ce troisième voyage, dont l’itiné- raire a été de près de cinq cents kilomètres, complétera de la manière la plus heureuse les deux précédents.

Enfin nous signalerons encore le voyage accompli par M. Boulangier, Ingénieur des Ponts et Chaussées,

1. Excursions el reconnaissances.

2. Résultats de la reconnaissance faile sur le terrain en no- vembre et décembre 1879, par MM. Perrusset, capitaine d'état- major, aide de camp du gouverneur, Rozée d'Infreville, capitaine d'infanterie de marine, aide de camp du gouverneur, Ricard, mé-

decin auxiliaire de la marine. .


LE TOUR DU MONDE.

qu'un itinéraire sinueux a conduit dés frontières de la Cochinchine au paysde Siam, à travers le Cambodge. Il a étudié le bassin du Tonlé-Sap, ou grand lac, qui, selon lui, fut autrefois le fond du golfe actuel de Siam: de puissantes alluvions l’ont comblé, reliant ainsi à la terre ferme les massifs montagneux assez élevés si- tués au sud de Pursat, et qui formaient autrefois une île. Le Tonlé-Sap lui-même, sujet à de grandes crues, se comblerait peu à peu par un colmatage.

Ainsi se précisent peu à peu les lignes encore flot- tantes du figuré d’une partie de l’Indo-Chine. On peut aisément se rendre compte de ce qui reste à faire, en jetant un coup d’œil sur la grande carte de PIndo-Chine orientale dressée par M. Dutreuil de Rhins et dont la récente publication fait honneur au Ministère de la Ma- rine. On doit exprimer ici le vœu que ce département, pourvu de s1 puissantes ressources, complète l’œuvre en publiant ou en aidant à publier la partie encore manuscrite de la carte de M. Dutreuil de Rhins, qui comprend le Bengale oriental et l’Assam avec le Tibet oriental et la Chine méridionale. Consciencieusement élaboré à l’aide des meilleurs matériaux, ce travail scrait d’une utilité de premier ordre pour suivre les découvertes et les événements dans une partie de l'Asie également intéressante pour la science et pour la politique.

IV

Nous allons voir revenir, après deux années fruc- tueusement employées à remplir une mission du Mi- nistère de Instruction publique, le docteur Mon- tano. IL était parti avec le docteur Paul Rey pour faire aux îles Philippines et en Malaisie des études d'anthropologie et d'histoire naturelle. Après une re- lâche dans la presqu'ile de Malacca et plusieurs voyages aux environs de Manille, ils s’embarquèrent pour visiter l’île de Soulou, tentative fort dangereuse à cause du fanatisme des Malais qui habitent File. De Soulou, qu'ils traversèrent pour aller visiter Maïboun, sa capitale, MM. Montano et Rey gagnèrent Davao, au sud-est de l’île de Mindanao. Là M. Montano con- tinua seul ses explorations où la géographie aura également une bonne part, car, après avoir accompli une ascension au volcan Apo, non loin de Davao, le voyageur a parcouru du sud au nord toute la longueur de l’ile, dans sa partie orientale. Davao fut son point de départ et Butuan son point d'arrivée ; 1l compléta cet itinéraire d’un mois de route par une reconnais- sance du lac Maïnit, au nord extrême de l’ile, et réunit des éléments utiles pour la carte de Mindanao.

Non content de cette traversée, M. Montano se re- mettait en route, le 11 janvier 1881, pour gagner Davao, en naviguant le long de la côte orientale de l'ile. Mais la mer est si mauvaise dans ces parages, que le voyageur, après avoir été menacé plusieurs fois de voir sombrer sa pirogue à balancier, dut revenir à Surigao, son point d'embarquement. Il en repartit à pied, traversa l’île à la hauteur de Bislig, et rejoignit