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gosa-Yama. Les jeunes sommelières de la maison s’empressent de nous servir des rafraîchissements, et nous prenons un instant de repos avant de nous approcher des pavillons qui, aux deux extrémités de la terrasse, se détachent librement sur le ciel.

Enfin le moment vient où nos regards vont planer sur la grande cité. Nous commençons par le pavillon du sud. L’on est d’abord tout ébloui de l’étendue et de l’éclat du tableau. Le soleil descend à l’horizon, dans un ciel sans nuage ; la transparence de l’atmosphère nous permet de distinguer les forts à la surface lumineuse de la baie. Mais sur tout l’espace qui s’étend de la rade au pied de notre colline, la vue ne sait où s’arrêter : on dirait un océan de longues rues, de murailles blanches, de toitures grises. Rien n’interrompt la monotonie de ce tableau, si ce n’est, çà et là, quelques beaux groupes d’arbres au noir feuillage, ou quelque temple dont le pignon surgit comme une vague au-dessus des lignes onduleuses des habitations. Dans un quartier de notre voisinage, une large trouée faite à travers les rues, comme si une trombe y avait passé, signale la trace d’un récent incendie, et, plus loin, le sombre massif des collines consacrées à la sépulture des Taïkouns offre l’image d’une île solitaire dominant une mer houleuse.


Portail d’Atagosa-Yama. — Dessin de Lancelot d’après une photographie.

Le panorama du pavillon du nord est encore plus uniforme, si c’est possible. Il embrasse les quartiers spécialement habités par la noblesse, et il a pour limite, à l’horizon, les remparts et les parcs touffus du castel.

Les daïmio-yaskis ou résidences seigneuriales, auxquelles nous donnons improprement le nom de palais, ne diffèrent entre elles que par leurs dimensions en étendue. Les plus opulentes et les plus modestes présentent le même type d’architecture, le même caractère de simplicité. Elles se composent d’une première enceinte continue de bâtiments réservés à la domesticité et aux hommes d’armes du prince. Ces bâtiments n’ont qu’un étage au dessus du rez-de-chaussée, et forment un carré long, qui est toujours entouré d’un fossé. Une seule toiture les recouvre, sans autre solution que le fronton d’un portail pratiqué généralement au centre de chacun des côtés du parallélogramme. Une seule muraille les protége, et le plus souvent elle n’offre d’autre issue sur la voie publique que ce même portail. Quant aux fenêtres, elles sont en grand nombre, basses et larges, régulièrement espacées sur deux lignes parallèles, et ordinairement fermées par un grillage en bois.

Une seconde enceinte, à l’intérieur, séparée de la première par une cour et quelques dépendances, contient la résidence seigneuriale proprement dite. Les principales pièces et la vérandah de l’habitation donnent sur