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La balle siffle et le sabre résonne,
Voilà ce qui transporte le Hongrois.
En avant !!!

Élève haut ton étendard, Hongrois,
Pour que le monde entier le puisse voir.
En avant !!!

Qu’on le voie et qu’on lise ta devise :
Car c’est un nom sacré : « La Liberté ! »
En avant !!!

Quiconque est né Hongrois, quiconque est brave
Regarde dans les yeux de l’ennemi.
En avant !!!

Étant Hongrois, on doit être un héros ;
Et ce qu’on veut, Dieu lui-même le veut.
En avant !!!

Là, sous mes pieds, la terre se rougit
De sang… ils ont tué mon camarade.
En avant !!!

Je ne serai pas moins brave que lui ;
Allons ! je veux me plonger dans la mort !
En avant !!!

Oui, si nos bras tombent tous deux coupés,
Si nous devons périr tous… Eh ! quand même,
En avant !!!

S’il faut mourir, eh bien ! soit ! mourons tous !
Et que par nous vive notre patrie.
En avant !!!

Un orage dans le Puzsta. — Dessin de Lancelot.

Les rasades se succèdent ; chacun porte un toast en m’interpellant : Franczia baratom ! (ami français !) Il m’est impossible, quelque bonne envie que j’en aie, de suivre le fil du discours de douze interlocuteurs dont la moitié ne parle pas ma langue. Malgré d’officieux interprètes, je ne saisis que des lambeaux de dialogues ou de récits. Mais je n’ai pas besoin d’entendre ou de comprendre les mots pour deviner le sens de chaque phrase. Il n’y en a qu’une, toujours la même, mais brodée de mille manières : la Hongrie glorieuse et libre à l’aide de la France ! « Ah ! si la France voulait ! » C’est le cri de tous les peuples en détresse. Tout le monde me parle à la fois. Je ne sais à qui entendre. Un avocat me fait, en style de palais, l’historique des rapports de la Hongrie et de l’Autriche : « Deux individus s’associent ; au bout de quelque temps l’association tourne mal. L’un des deux nie l’apport de son coassocié et prétend qu’il n’a pas même de compte à lui rendre. Voilà la situation en deux mots. » Et il s’évertue à me démontrer que l’Autriche n’a pas rempli de bonne foi ses engagements. La chose me paraît assez claire par elle-même, et je prête l’oreille d’un autre côté.

Lancelot.

(La suite à une autre livraison.)