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le mur se change en un amas de pierres cimentées avec de la boue et à peine élevées à un mètre de haut.

On franchit la grande muraille au nord de Kalgan par une porte fortifiée située au fond du défilé et reliée à la muraille par un rempart de six mètres d’épaisseur avec demi-lune tournée vers la Mongolie.

La belle photographie reproduite ci-joint donne une idée exacte de l’aspect grandiose de ces imposantes constructions.

La grande muraille au nord de Kalgan. — Dessin de Thérond d’après une photographie.

Rien de plus impraticable que les gorges de montagnes où les voyageurs durent s’engager, après avoir franchi la grande muraille. Ce sont les torrents seuls qui ont frayé la route encombrée de rochers et de cavités escarpées ; aussi les voitures n’y passèrent qu’avec une difficulté extrême. Certains sites en sont très-pittoresques ; le chemin sinueux est surplombé par des roches affectant les formes les plus bizarres, au milieu desquelles s’ouvrent de profondes grottes ; des forêts sombres d’arbres verts en couvrent toutes les pentes et, de temps en temps, des sources d’eau limpide se précipitent dans les anfractuosités.

Des niches naturelles, ornées de grossières idoles, se font remarquer dans les parois de la montagne : les Mongols qui passent ne manquent pas de les entourer d’ex-voto, de chiffons et de fétiches ; un vieux lama, ermite de ce désert, y demande une légère contribution aux voyageurs, sous prétexte qu’il entretient la route, ce dont on ne s’aperçoit guère.

Cette chaîne de montagnes, appelée par les Chinois In-Chaun et par les Mongols Tching-ghanoula, est d’une altitude moyenne de six à sept cents mètres au-dessus de la mer.

Quelques riantes vallées bien boisées et bien cultivées se font remarquer au centre des monts In-Chaun.

Ce fut à l’une de ces vallées qu’on s’arrêta pour déjeuner dans un petit village appelé Ouche-tiao.

« On nous a servi à l’auberge, où nous sommes arrivés mourants de faim à deux heures de l’après-midi, d’excellentes galettes de farine d’orge en forme de crêpes, qu’on a faites, devant Mme de Baluseck et devant moi, sur une plaque de tôle chauffée à blanc ; il y avait aussi des pâtisseries contenant de petites graines entières qui craquaient sous la dent ; cela était moins bon, à cause de l’inévitable graisse qui remplace le beurre.

« En descendant des montagnes, on aperçoit une vallée verdoyante parsemée de quelques arbres, et devant soi le plateau de la Mongolie se dessinant en pente douce à l’horizon : au pied du plateau est la station de Zagau-tolgoï, composée de quelques misérables masures, où on ne s’arrête que pour changer de chevaux.

« Les charretiers chinois y ont été remplacés par des postillons mongols, qui conduisirent les voitures à fond