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s’occupa d’embellir les édifices publics. Sa correspondance avec l’empereur Trajan relativement à la reconstruction des bains de Prusa est un document précieux ; elle montre ce qu’était le système de centralisation appliqué au gouvernement des provinces romaines : « Les Prusiens ont, dit-il, un bain vieux et en mauvais état ; ils voudraient le reconstruire, si vous le permettez, et je crois que vous pouvez accueillir leur demande. Cet ouvrage sera par sa magnificence digne de votre règne. »

De l’époque romaine il ne reste à Brousse aucun monument.

Il faut sans doute attribuer à ses eaux thermales, fort appréciées des patriciens de Byzance, les développements qu’elle reçut sous le Bas-Empire. Mais des circonstances moins heureuses devaient bientôt lui procurer une plus haute illustration. Au moment où l’Asie Mineure devenait le champ de bataille ouvert aux premières agressions de l’islamisme, l’importance de sa situation, au point de vue stratégique, fut comprise de tous les partis.

Dès le commencement du dixième siècle, les Sarrasins avaient poussé jusque-là leurs excursions ; prise par l’émir Seifed-Devlet, elle avait été démantelée.

Les empereurs y étaient rentrés, l’avaient perdue de nouveau, puis, mettant à profit le passage des premiers croisés, s’appropriant les résultats de leurs victoires, comme nous les avons vus le faire à Nicée, traitant sous main avec les sultans ; ils avaient reconstitué un empire en Asie Mineure, pendant que les Francs leur enlevaient celui de Constantinople.

Théodore Lascaris releva et fortifia les murailles de Brousse, une inscription en fait foi ; elles purent ainsi résister à tous les efforts des Latins.

L’Asie Mineure, pendant le siècle suivant, présente un singulier spectacle. Les empereurs de Byzance et les sultans Seljoucides se montrent également impuissants à maintenir sous leur autorité les provinces de l’Anatolie. Il s’y était formé une foule de petites principautés féodales échues à des despotes grecs ou à des beys musulmans dont les possessions s’entremêlaient, et qui vivaient un jour en commensaux, un jour en ennemis.

Brousse : Mosquée du sultan Bayézid (voy. p. 246).

Il n’est pas hors de propos de rapporter ici un épisode curieux bien propre à caractériser cette situation ; il est comme le prélude de la prise de Brousse par les Turcs.

Osman fils d’Erthogrul, premier auteur de la dynastie des souverains ottomans, occupait avec le titre de bey et sous’autorité nominale du sultan d’Iconium, une partie de la Bithynie. Un Grec, qui tenait le château de Iarhissar l’invita aux noces de sa fille où il réunissait tous les seigneurs grecs et turcs du pays.

Osman, non sans raison, vit là une embûche et se montra plus habile que son voisin. Le futur gendre du gouverneur de Iarhissar possédait le château de Bélédjik ; Osman le pria d’y recevoir ses trésors et ses femmes, qu’un ennemi eût pu lui enlever pendant qu’il prendrait part aux fêtes du mariage. Sous un déguisement féminin il introduisit quarante jeunes guerriers dans le château de Bélédjik. Le festin devait avoir lieu non loin de là, dans la plaine. Les invités venaient d’y prendre place, quand, au-dessus des murailles de Bélédjik, on vit des flammes s’élever ; les Grecs se précipitent pour éteindre l’incendie ; mais les compagnons d’Osman avaient jeté bien loin leur déguisement ; les Grecs furent massacrés et, le soir même, Osman était maître de Bélédjik et de Iarhissar ; la fiancée tombée en son pouvoir devint la femme de son fils Orkan.

Les deux bourgs qu’Osman venait d’occuper, sont situés sur le versant oriental de l’Olympe ; devenu sultan après la mort du dernier souverain d’Iconium, il porta ses visées plus loin et envoya Orkan assiéger la ville de Brousse.

Orkan prit d’abord Adranas qui commande le cours du