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des religieux et à l’entretien du couvent, la grande église dédiée à sainte Catherine, vingt-quatre chapelles, et, ce qui nous étonne le plus, une ancienne mosquée qui s’élève au milieu de l’enceinte ; le supérieur nous dit qu’on l’a élevée pour l’usage des Arabes employés dans le couvent ; probablement aussi ce fut une concession obligée à l’autorité musulmane : c’est une sorte de palladium profane contre les tribus de la presqu’île sinaïtique. Extérieurement, l’église est plus que modeste ; à l’intérieur elle est richement décorée. Elle est divisée en trois nefs, séparées par des colonnes de granit blanchies à la chaux, qui supportent un plafond de bois peint et semé d’étoiles d’or. Le sanctuaire est fermé par une boiserie sculptée et dorée ; l’autel, en marqueterie d’écaille et de nacre, est chargé d’œuvres d’orfèvrerie offertes par de riches croyants ; le siége de l’évêque est en bois sculpté et doré ; le pavé est fait de marbre, de serpentin et de granit ; le supérieur nous fait remarquer quelques peintures byzantines, les médailles des fondateurs, Théodose et Hélène, à l’abside une mosaïque représentant Moïse, jeune, beau, imberbe, à genoux devant le buisson ardent, et, dans une autre scène, recevant des mains de Dieu les tables de la loi. La place même où était le buisson se trouve, dit-on, à gauche du maître-autel ; on l’a enfermée dans une chapelle où l’on ne peut entrer qu’après avoir ôté ses chaussures ; non, sans doute, comme on le répète souvent, par imitation d’une coutume musulmane, mais en mémoire de ces paroles du Seigneur à Moïse, lorsqu’il l’appela du milieu du buisson : « Ôtez les souliers de vos pieds, parce que le lieu où vous êtes est une terre sainte. »

Bédouin de la presqu’île du Sinaï. — Dessin de H. Pottin d’après Bida.

Cette église est sous l’invocation de sainte Catherine, dont le tombeau, orné et entouré de lampes et de cierges toujours allumés, attire un grand nombre de pèlerins.

Dans la bibliothèque, on nous laisse entrevoir plutôt que voir des manuscrits grecs et arabes, au nombre, dit-on, d’environ 1 500. On nous permet de regarder de plus près l’évangéliaire de l’empereur Théodose, et un psautier qui aurait appartenu à sainte Catherine.

Nous nous promenons dans le jardin qui est tout en fleur. Sa verdure, au milieu des rochers arides qui nous entourent, est d’un effet charmant : il nous rappelle nos vergers aux beaux jours de mai et de juin. Les arbres sont blancs et roses. Les amandiers, les figuiers, les oliviers, la vigne, les pêchers, les poiriers surtout, produisent, nous assurent les moines, d’excellents fruits.

Nous visitons deux cryptes funéraires, ossuaires où sont déposés séparément les os des prêtres et des frères