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où il déclare que la propriété privée est un principe vital, nécessaire pour la société. Il ne s’agit pas d’une évolution — chaque homme a le droit d’évoluer en tenant compte des nouvelles réalités, des nouveaux faits —, il s’agit d’une contradiction inexplicable.

Dans le mémoire que je viens de développer, publié en 1840, c’est la négation la plus absolue, la plus violente, la plus brutale de la propriété privée. A la fin de sa vie, nous trouvons, comme je l’ai dit, dans un livre, — pas dans une phrase —, dans un traité sur la propriété, nous trouvons l’affirmation la plus solennelle de la nécessité de la propriété. Pendant toute sa vie, Proudhon combattait le communisme, précisément parce que le communisme nie la propriété privée. Le communisme, selon lui, c’est l’absence de toute propriété, c’est l’esclavage. Il a lancé contre le communisme les arguments les plus banals que nous opposent aujourd’hui tous nos adversaires.

La prochaine fois, je vous parlerai de ses autres idées, fondamentales de son mutuellisme, qui était sa doctrine propre, de son fédéralisme, du rôle qu’il a joué dans la critique de la religion. C’est son rôle positif, fécond. Je ferai en même temps la critique de sa philosophie, de sa méthode, parce que Proudhon, c’est l’exemple le plus typique de la nécessité d’une méthode scientifique du socialisme. Vous le verrez par ce remarquable exemple : Proudhon a laissé plus de 50 volumes ; il a été très fécond ; ce fut un écrivain, comme je vous l’ai dit, de premier ordre, un dialecticien vigoureux, avec un immense talent, de vastes connaissances, une raison claire, une logique vigoureuse. Malgré tout cela, grâce à une méthode défectueuse, méthode que j’ai caractérisée dans une précédente leçon, comme la méthode rationaliste, qui ne se base pas sur les faits, mais sur le raisonnement logique, abstrait, grâce à cette méthode qui est le contraire de la méthode du socialisme moderne, Proudhon a, jusqu’à un certain point, mérité l’oubli ou la négligence dans laquelle il est tombé, du moins chez les socialistes.

Car, si Proudhon est négligé par les communistes modernes, il est très apprécié par les réactionnaires, par les conservateurs. Il existe même, dans les milieux de l’Action