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LA TRANSITION DE LA PROSPÉRITÉ À LA SOUFFRANCE

plénitude, à leurs subordonnés l’état de bonheur que « l’amour paternel » assure à chaque famille chez les races simples. Les sages qui fondent les grands empires se préoccupent tout d’abord de cette difficulté. En conséquence, ils s’appliquent à établir la paix sociale sur l’accord de deux sentiments : ils développent autant que possible, chez le peuple, « l’esprit d’obéissance, » et chez ceux qui dirigent « l’esprit de paternité ».

Malheureusement cet accord n’a été durable, dans le passé, chez aucun empire prospère ; et toujours la rupture a eu pour cause la corruption des classes dirigeantes. Oubliant le principe de leur institution, elles n’ont point rempli les devoirs de la paternité. Elles ont même opprimé ceux qu’elles devaient servir. Non seulement elles ont manqué à leur mission de paix, mais, en poussant le peuple à la révolte, elles ont déchaîné la discorde.

Cette corruption des classes dirigeantes a entraîné des conséquences fort diverses pour les nations. Les unes ont persisté dans le mal, et elles ont descendu, jusqu’à une ruine complète, tous les degrés de la décadence. Les autres ont retrouvé la prospérité en accomplissant, dans leur constitution sociale, les réformes nécessaires. Toutefois, ces retours vers le bien n’ont jamais été permanents : il n’existe aucun empire qui, depuis son origine, reste classé au premier