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Mais quelle mort ! la chair, misérable martyre,
Retourne par son poids où la cendre l’attire,
Vos corps sont revenus demander des linceuls ;
Vous les avez jetés, dernier lest, à la terre,
Et, laissant retomber le voile du mystère,
Vous avez achevé l’ascension tout seuls !

Pensée, amour, vouloir, tout ce qu’on nomme l’âme,
Toute la part de vous que l’infini réclame,
Plane encor, sans figure, anéanti ? non pas !
Tel un vol de ramiers que son pays rappelle
Part, s’enfonce et s’efface en la plaine éternelle,
Mais n’y devient néant que pour les yeux d’en bas.

Mourir où les regards d’âge en âge s’élèvent,
Où tendent tous les fronts qui pensent et qui rêvent !
Où se règlent les temps graver son souvenir !
Fonder au ciel sa gloire, et dans le grain qu’on sème
Sur terre propager le plus pur de soi-même,
C’est peut-être expirer, mais ce n’est pas finir  :

Non ! De sa vie à tous léguer l’œuvre et l’exemple,
C’est la revivre en eux plus profonde et plus ample,
C’est durer dans l’espèce en tout temps, en tout lieu,
C’est finir d’exister dans l’air où l’heure sonne
Sous le fantôme étroit qui borne la personne,
Mais pour commencer d’être à la façon d’un dieu !

L’éternité du sage est dans les lois qu’il trouve ;
Le délice éternel que le poëte éprouve,