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LE MÉNESTREL

dans la fameuse Fuerstenloge, la grande loge au centre de la salle, où Guillaume Ier était assis à côté de Richard Wagner à la première représentation de l’Or du Rhin en 1876, mais très simplement parmi tous les spectateurs, et personne ne se doutait, à Bayreuth, que les deux dames anglaises, en costume de voyage, qui se promenaient pendant les entr’actes, comme tout le monde, devant le théâtre, étaient la princesse de Galles et une de ses dames d’honneur.

— La saison de Londres est terminée selon les conventions usuelles, car le parlement ne siège plus, mais les théâtres de la capitale, en dehors de l’Opéra de Covent-Garden, ne chôment pas et produisent même des pièces nouvelles. C’est ainsi que l’Opéra-Comique vient de jouer avec un succès médiocre une opérette inédite Newmarket, qui se dénomme sur l’affiche « comédie originale, sportive et musicale » ; elle a pour auteur des paroles Mme Frank Taylor, et pour compositeur M. Ernest Boyd-Jones. L’Avenue-Théâtre vient de jouer, avec beaucoup de succès, une nouvelle opérette, intitulée Monte-Carlo, écrite en collaboration par MM. Sidney Carlton, Harry Greenbank et Howard Talbot.

— Le théâtre royal de Copenhague, jouera pendant la saison prochaine deux opéras inédits de compositeurs scandinaves. L’un, en trois actes, intitulé Vifandaka, a pour auteur de la musique, M. Alfrd Toffs ; l’autre, en un acte, a pour titre Bagahijol, et la musique est de M. Émile Hartman.

— Le nombre des compositeurs appartenant à une famille souveraine augmente continuellement. Voilà qu’on nous apprend que le prince Mirko de Montenegro, qui sera bientôt le beau-frère du futur roi d’Italie, est un musicien consommé. Malgré sa jeunesse — il ne compte pas dix-sept printemps — il a déjà composé des quatuors pour instruments à cordes, voir des opérettes. Actuellement, il serait en train de terminer un opéra qui doit être joué au nouveau théâtre de Cettigne, à l’occasion du deux centième anniversaire de l’avènement de la dynastie régnante.

PARIS ET DÉPARTEMENTS

M. Carvalho, obligé de renoncer à son projet d’aller à Munich voir jouer Don Juan, est rentré à Paris la semaine dernière pour surveiller personnellement les travaux de réparation entrepris dans son théâtre et les activer de façon à pouvoir rouvrir à la date du 15 septembre.

Tous les artistes ont été individuellement avisés que, par suite de ces travaux, la rentrée était reculée de quinze jours. Voilà qui va bien comme prolongation de congé, mais qui enchante moins les pensionnaires de l’Opéra-Comique allégés, de ce fait, de la moitié de leurs appointements du mois de septembre.

Les chœurs ont repris leur service, au théâtre, dès lundi dernier sous la direction de MM. H. Carré et Marietti.

— On commence à parler de la prochaine saison des concerts à l’Opéra, et voici que notre confrère Jules Juret, du Figaro, nous fait part d’un plan plutôt original que caresserait M. Henri Busser. Le jeune compositeur rêverait d’écrire une suite d’orchestre qu’il dénommerait Falguière ; chacune des parties de la suite décrirait une des œuvres principales du maître : le Jeune Martyr, le Vainqueur au combat de coqs, Léda, Diane. Voilà pour nos modernes musiciens, toujours en quête de titres étranges, une mine toute trouvée, car rien n’empêchera, après s’être servi des noms de nos grands sculpteurs et de nos grands peintres, de s’attaquer aux romanciers. À qui un Zola, avec la suite des Rougon Macquart, ou un Georges Ohnet, avec celle des Batailles de la vie ?

— Pour ces mêmes concerts, on dit que MM. Bertrand et Gailhard auraient entre autres projets, celui de monter acte par acte l’Orphée de Gluck, avec M. Alvarez dans le rôle créé primitivement par la sopraniste Guadigni. Lorsque, successivement, les trois actes auraient été chantés aux séances dominicales, l’ouvrage étant prêt, musicalement tout au moins, pourra entrer ainsi tout naturellement au répertoire de l’Opéra. Même procédé serait employé pour Iphigénie en Tauride, qui aurait pour interprète M. Sizes. On parle aussi du premier acte de la Briséïs d’Emmanuel Chabrier ; mais, là, M. Lamoureux réclame la priorité pour ses propres concerts.

M. Édouard Mangin, de retour de Contrexéville, a repris dès lundi dernier, possession du pupitre de chef d’orchestre à l’Opéra. C’est lui qui conduira Hamlet, mercredi, pour la rentrée de M. Renaud.

— Au Conservatoire : Les nominations des professeurs aux chaires devenues vacantes à la suite de retraites ou décès, auront lieu désormais par élections. Les années précédentes, la direction du Conservatoire choisissait les candidats dont les noms étaient soumis à M. le ministre de l’instruction publique qui, en dernier ressort, les nommait. À partir de cette année, une commission se formera ; elle sera composée des professeurs titulaires et du haut personnel du Conservatoire, des membres du jury qui, chaque année, assistent au concours, des membres de l’Académie des beaux-arts (section de musique et de littérature), d’auteurs et critiques choisis par le ministre de l’instruction publique. À cette commission seront soumis les noms des candidats aux différentes chaires, quelle que soit la classe. Puis, par élection, on procédera à la nomination des futurs professeurs susceptibles d’être proposés au ministre de l’instruction publique, lequel les nommera définitivement.

— Il n’y a encore rien de décider au sujet du gala que le gouvernement français ne peut manquer d’offrir, dans la salle de l’Opéra, à l’empereur et à l’impératrice de Russie. Mais, comme on craint que le séjour assez court des souverains russes ne permette pas de les convier aussi à la Comédie-Française, les artistes de la maison de Molière ont demandé à figurer dans le programme de l’Opéra. M. des Chapelles et M. Jules Claretie ont déjà discuté ce très légitime désir.

— De son côté, M. Grisier, directeur des Bouffes-Parisiens et des Menus-Plaisirs, aurait, paraît-il, l’intention de donner, en ce dernier théâtre, une représentation, lors de l’arrivée de l’empereur de Russie, de la Vie pour le Tzar, de Glinka. On dit même que le rêve de M. Grisier serait de profiter de ce point de départ pour créer, dans la salle du boulevard de Strasbourg, « l’Opéra russe ».

— La Société des compositeurs de musique met au concours pour l’année 1896 :

1o Un Quatuor à cordes. — Prix unique de 500 francs. (Allocation de M. le Ministre de l’instruction publique et des beaux-arts.)

2o Une Sonate pour piano et violoncelle. — Prix unique de 500 francs. (Fondation Pleyel-Wolff.)

3o Un Motet pour voix seule ou plusieurs voix, avec accompagnement d’orgue. — Prix unique de 200 francs. (Reliquat du prix Ernest Lamy, non décerné).

4o Un Sextuor en trois petites parties pour instruments à vent. — Prix unique de 300 francs, offert par la société. — Le choix des instruments est laissé à la volonté des concurrents. — Une réduction au piano devra accompagner le manuscrit.

On devra adresser les manuscrits avant le 31 décembre 1896, à M. Weckerlin, archiviste, au siège de la Société, 22, rue Rochechouart, maison Pleyel, Wolff et Cie. — Pour le règlement et tous renseignements, s’adresser à M. D. Balleyguier, secrétaire général, 9 impasse du Maine.

— À Royan, succès colossal pour l’Ève de Massenet. Interprétation remarquable de la part des chœurs et de l’orchestre sous la très artistique direction de M. Ph. Flon. Gros succès pour MM. Leprestre, Albers, et Mme Oswald. Quelques jours avant, Werther avait aussi grandement réussi.

— À son passage, à Laval, M. le Président de la République a remis les palmes d’officier d’académie à M. Prosper Mortou, chef de la Lyre Lavalloise, et fort agréable compositeur de musique.

— Du Havre : Au Casino Frascati, Mlle Buhl, dont les abonnés de l’Opéra-Comique n’ont pas perdu le souvenir, donne une série de représentations des mieux accueillies. Il y a longtemps que les Havrais mélomanes ne s’étaient trouvés à pareille fête auditive : samedi soir, dans Lakmé, ils ont acclamé l’exquise élève de Mme Carvalho, qui ajoute à la bonne tradition vocale sa note si personnelle de sensibilité spirituelle et douce ; jeu délicat, diction savante, et vocalise impeccable. L’Air des clochettes, pierre de touche des cantatrices, lui a valu bravos et rappels ; et la finne partition du regretté Léo Delibes a rencontré une interprète que le redoutable Berlioz aurait pu, sans hésiter, mettre « au nombre de ces chanteurs adroits, utiles et charmants » dont il parle, — « ceux qui savent la musique et qui chantent. »

R. B.

— On nous écrit de Montivilliers : les fidèles de l’église Saint-Sauveur conserveront le souvenir de la musique qu’ils y ont entendue le jour de l’Assomption. Mme Louise Comettant, élève de l’éminent organiste L. Vierne, de passage en notre ville, a chanté pendant la grand’messe plusieurs morceaux remarquables avec un sentiment profond et une voix pénétrante. Elle a ensuite tenu l’orgue pour l’accompagnement d’une composition instrumentale de beaucoup d’effet, exécutée par Mlle Laurence Vénière.

— Tout Paramé et tout Dinard s’étaient donné rendez-vous mercredi dernier au casino dee Saint-Malo pour aller entendre M. Louis Diémer qui, en villégiature à Dinard, prêtait son concours à un concert donné par le jeune violoniste M. Jules Boucherit. Le merveilleux pianiste s’est fait acclamer dans des pièces de Mozart, de Hændel, de Dacquin, de Liszt, de Beethoven, de Godard, son Caprice pastoral et sa vertigineuse Valse de concert. M. Boucherit a délicatement joué des morceaux de Sarasate et la Romance de Louis Diémer. L’orchestre, dirigé par M. Gianini, a eu sa part des bravos après le Nocturne de la Navarraise, de Massenet.

— À l’église Saint-Étienne de Fécamp superbe messe en musique, dans laquelle l’excellent ténor, M. Mazalbert, s’est taillé un véritable succès en interprétant d’une manière remarquable l’Ave Verum, de Th. Dubois, et le célèbre Notre Père, de J. Faure, qui ont produit une profonde impression.


Henri Heugel, directeur-gérant.


AVIS AUX PROFESSEURS. — Belle salle pour auditions, cours et leçons, matinées et soirées. Location au mois et à la séance. — S’adresser

Maison musicale, 39, rue des Petits-Champs. Paris.

imprimerie centrale des chemins de fer. — imprimerie chaix, rue bergère, 20, paris. (Encre Lorilleux)