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ÂNICHON, s. m. — Petit ânon. — C’est à tort que le bon Molard prétend qu’il faut dire ânon. Ânon est le diminutif d’âne ; ânichon est le diminutif d’ânon. C’est du reste du vieux franç. (Cotgrave).

ÂNIER, s. m. — Le conducteur du tombereau qui ramasse les équevilles. Autrefois il n’y avait pas de service de balayage. Des paysans du voisinage, afin de se procurer de l’engrais, venaient remplir les paniers de leurs ânes avec les équevilles que les ménagères jetaient à leur porte. Il en était ainsi à la fin du xviiie siècle pour Naples même. D’où l’importance de l’ânier. Le mot s’est conservé lors même que l’ânier ne conduit plus un âne, mais un tombereau.

P. Blanc remarque très justement que l’ânier ne revendique son titre qu’au jour de l’an, rapport aux étrennes.

ANILLE, s. f. — Béquille. Un pauvre affligé qui marche sur des anilles. — Anilles s’est conservé dans le blason. C’est une figure représentant exactement deux becs d’anille adossés, appelant bec le morceau en forme de demi-lune qui se place sous l’aisselle. — De anaticula, petite canne. La signification primitive était pièce de fer en forme de queue d’aronde, puis birloir. L’analogie de la forme a amené le sens. Comp. béquille, manivelle de serrure ; bec de cane. Les anilles du blason sont probablement la représentation de l’objet primitif.

ANISETTE, s. f. — Eau-de-vie anisée. Voyez Eau blanche.

ANNÉE. — Année de foin, année de rien. Pour ce qu’années de foin sont années de pluie ; et que les années de pluie, qui font le bonheur des ânes, font l’infortune des chrétiens, le raisin voulant soleil. Par quoi avait raison l’ancien curé de Condrieu disant le soleil être, après Dieu, notre plus grand bienfaiteur ; vu que le bon soleil fait le bon raisin, le bon raisin fait le bon vin, le bon vin fait le bon sang, et le bon sang fait le bon sens, qui est le plus grand bien de la vie.

ANNONCÉS. — On les a annoncés dimanche. Métonymie simplifiante pour : « Dimanche dernier, à l’église, on a annoncé leur mariage. »

ANSE. — Elle a passé devant le four d’Anse elle ne sait plus rougir.

Le four d’Anse, le forum. Place au-devant de l’ancienne porte, où se tenait et se tient peut-être encore le marché.

On explique l’origine de ce dicton par ce fait que les femmes d’Anse, en attendant leur tour de cuisson au four banal, avaient l’habitude de conversations si scandaleuses et même d’actes si libres que rien ne pouvait plus faire rougir les témoins de ces scènes. (Histoire d’Anse par Yves Serraud.)

Sur l’origine de la locution : Elle a passé devant le four d’Anse, un écrivain lyonnais, qui a publié récemment sous le pseudonyme de Gil Bert d’intéressantes études sur notre région, donne l’explication suivante. Elle n’est peut-être pas d’une rigoureuse exactitude ; elle mérite cependant d’être signalée.

« Une célébrité singulière, écrit-il, s’était attachée à Anse : elle avait pour cause le four banal où se cuisait le pain de toute la ville. Les femmes d’Anse, alors connues pour leur beauté, se réunissaient sur une place, devant le four, pour attendre leur tour de cuisson, et comme la route de Paris passait là, elles arrêtaient les voyageurs, les accablaient de quolibets et finissaient par en venir à des voies de fait qui allèrent jusqu’à des mutilations fâcheuses. De là le dicton connu dans toute la France pour désigner une effrontée : Elle est moins que rien, elle a passé devant le four d’Anse.

« Et souvent, quand un régiment passait devant le four, les officiers faisaient mettre baïonnette au canon et criaient : Garde à vous ! »

De Villefranche à Anse, la plus belle lieu de France. — À cause de la fertilité du terrain.

ANSIÈRE, s. f. — Manette. — D’anse, qui suffisait, car iére ne sert pas plus ici qu’une cinquième roue à un bateau. Mais le suffixe ière s’employant en général pour composer des noms d’objets, on a voulu mettre anse en harmonie avec aiguière, lanière, jarretière, pissotière, etc.

À N’UN. — Manière de détruire l’hiatus, toujours choquant pour le populaire. Christine, la bonne de ma grand’, achetait-elle les pastonades à n’un sou le paquet, ne se doutant mie qu’elle copiait Villon : « Dites-moy où, n’en quel pays,

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