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regardait, en l’approchant de son tablier de cuir, le morceau de fer qu’il avait travaillé. Et, redressant la tête, il nous disait, histoire de souffler un peu :

— Eh bien ! ça va, la jeunesse ?

L’ouvrier restait la main en l’air à la chaîne du soufflet, mettait son poing gauche sur la hanche et nous regardait en riant.

Puis le travail sourd et bruyant reprenait.

Durant une de ces pauses, on aperçut, par la porte battante, Millie dans le grand vent, serrée dans un fichu, qui passait chargée de petits paquets.

Le maréchal demanda :

— C’est-il que M. Charpentier va bientôt venir ?

— Demain, répondis-je, avec ma grand’mère, j’irai les chercher en voiture au train de 4 h. 2.

— Dans la voiture à Fromentin, peut-être ?

Je répondis bien vite :

— Non, dans celle du père Martin.

— Oh ! alors, vous n’êtes pas revenus.

Et tous les deux, son ouvrier et lui, se prirent à rire.

L’ouvrier fit remarquer, lentement, pour dire quelque chose :

— Avec la jument de Fromentin on aurait pu aller les chercher à Vierzon. Il y a une heure d’arrêt. C’est à quinze kilomètres. On aurait été de retour avant même que l’âne à Martin fût attelé.