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LA VIE DE S. GILDAS, SURNOMMÉ LE SAGE,

Confesseur, Abbé du Monastere de 7ï/t : ys~ le 29 Janvier.

HEUREUX S. GILDAS, honoré par les anciens du nom de Sage, Pere & Maistre d’un grand nombre de Saints Religieux, estoit Breton insulaire, né en la Province de Cornoüaille Son père s’appelloit Caunus Seigneur riche & moyenné, il eut cinq fils & une fille l’aîné fut Caillus qui succéda à la

Seigneurie de son père ; le second fut Maillocq, lequel, ayant achevé le cours de ses études, se retira du monde & se rendit Moyne au Monastere de Luythen, au territoire d’Elmaïl, où il vescut & mourut saintement le troisième fut ~Egreas le quatrième Allaeus, lesquels, avec leur sœur Peteone, se retirèrent au désert, où ayans long-temps vescu au service de Dieu, ils moururent en opinion de Sainteté ; le sixième & dernier de tous fut S. Gildas, donné de Dieu à ses parens pour estre l’honneur de sa famille, l’Apôtre, Maistre et Docteur de plusieurs peuples. Si-tost qu’il peût distinctement parler, son père l’envoya au Monastere de S. Hydultus, où il eut pour compagnons d’écolles & condisciples saint Samson depuis Archevesque d’York, puis de Dol, & saint Paul après Evesque de Léon. La Classe où estoient instruits ces saints Enfans estoit située prés le rivage de la Mer, laquelle souvent entroit dedans ; Saint Gildas et ses condisciples suplièrent S. Hydultus d’impetrer de Dieu que la Mer se retirast plus au loin, le saint Abbé pria avec ses Disciples, & la Mer se retira miraculeusement aussi loin qu’ils voulurent, laissant à sec une grande pleine, qu’à force de travail & engrais on rendit labourable, & y sema-t-on du froment, mais les oyseaux maritimes le gastèrent, saints Gildas, Paul & Samson les amenèrent à leur Maistre aussi doux qu’agneaux, lequel admirant la vertu de ces jeunes Saints, donna la liberté à ces oyseaux captifs. II. Ayant atteint l’âge de 15 ans, & fait son cours en Philosophie & Theologie, touché de Dieu, oubliant son pais & ses parens, ayant perdu le goût des delices dont il pouvoit jouir en sa maison paternelle, il demanda humblement l’habit Monachal au même Monastere de saint Hydultus lequel ayant receu, il s’adonna avec telle ferveur à la mortification de ses sens, qu’il ressembloit plûtost un Ange qu’un homme ; il portoit presque continuellement la liaire à l’exemple des Nazaréens, ne beuvoit vin ny autre boisson qui pût enyvrer, à raison dequoy, il fut surnommé par les autres Moynes A~Har/M, Boy l’eau. Depuis qu’il se rendit Religieux jusques à la fin de sa vie, il ne fit que trois repas par semaine, & prenoit à chaque fois si peu de nourriture, qu’à peine estoit-elle bastante de le substanter ; son humilité estoit si extrême, que, même estant Abbé, il servoit aux offices les plus humbles du Monastere ; il estoit doué d’une grande douceur & affabilité, d’une extrême charité, d’une tendre devotion, d’une admirable patience bref, c’estoit un modelle acomply de toutes sortes de vertus, de sorte que son Abbé le jugea capable du Sacerdoce, & luy fit prendre tous les Ordres & chanter Messe. III. Son Abbé luy enjoignit d’aller prescher au costé Méridional de la Province de Cornoüaille, & faire part aux peuples de cette contrée des celestes Tresors dont il avoit fait bonne provision dans le Monastere, le Saint y obeit, &, en peu de temps, y fit si grands fruits & progrès, que la renommée de sa Sainteté vola jusques dans l’Hybernie, d’où sainte Brigite, (qui lors estoit Abbesse d’un Monastere de Vierges en cette Isle), envoya un Messager exprés vers luy se recommander à ses saintes prieres, & lui demander quelque chose beniste de sa main pour se souvenir de luy ; saint Gildas luy envoya une