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LA VIE DE S. HERVÉ.

le garçon y alla & luy apporta sa dent mais il avoit tellement couru, qu’il mouroit presque de chaud et de soif ; Saint Hervé, prévoyant cela, luy commanda de tirer son bourdon de l’endroit où il l’avoit fiché, &, tout incontinent, il sourdit, au lieu mesme, une belle fontaine, dont il beut, qui dure encore à présent et se nomme Feunteun sant Huvarné. 1

V. Ce saint Enfant, croissant en âge, croissoit aussi en vertu & mérites, & Dieu, par luy & en sa faveur, faisoit de grands miracles. Un jour, comme son guide le menoit par un village, quelques petits l’astres & bergerots, se moquans de luy, luy dirent ma éaz te, dallic ; ma-it-hu, da-hc ? c’est à dire, « où vas-tu, petit aveugle où allez-vous ; » mais le Saint, qui ne les voulut chastier si rigoureusement que le Prophete Elizée ces autres enfans qui se moquèrent de luy, leur dist « Petits sots que vous estes, je prie mon Dieu de pardonner à vos ames cette injure que m’avez faite, & le requiers qu’en punition d’icelle vous ne croissiez jamais plus » ce qui arriva ainsi ; ces enfans estans, toute leur vie, demeurez petits comme nains. Une autre fois, passant par le mesme village, il se blessa un pied (car il alloit toûjours deschaux) à des rochers pointus, lesquels devinrent depuis si durs, que fer ny acier n’y a pû mordre.

VI. Desireux de servir Dieu en estat Ecclesiastique, il alla à l’écolle, chez un saint Moyne, nommé MorftonHs, avec lequel il demeura l’espace de sept ans pendant lequel temps il apprit par cœur le Chant Ecclesiastique & la Grammaire, mais si parfaitement, qu’il emportoit le prix par sus tous ses condisciples. Sortant de cette écolle, il s’en alla trouver son Oncle maternel saint Wlphroëdus, personnage de rare Sainteté & Doctrine, lequel demeuroit en un petit Monastere en l’Archidiaconé d’Akh ; & ne sçachant bonnement en quel désert s’estoit réfugiée sa Mere (laquelle, ayant renoncé à tout son bien, s’estoit retirée en solitude) consulta le bon saint Wlphroëdus sur cette affaire, de laquelle Dieu l’éclaircit, luy revelant non seulement le lieu où estoit sa mère, mais encore qu’elle avoit obtenu pardon de ses pechez, &, dans peu de temps, devoit partir de ce monde cela le fit résoudre à l’aller au plûtost voir, recevoir sa benediction & l’aider à bien mourir ; mais saint Wlphroëdus obtint de luy (à raison de son incommodité & cécité) d’aller la voir premièrement ; puis, luy ayant rapporté de ses nouvelles, ils s’y en retourneroient ensemble.

VII. Saint Hervé s’y accorda, & S. TV~pTu’ofMns se mît en chemin, ayant recommandé son petit domicile à son Néveu saint Hervé, & à son guide, nommé Guiharan, de parachever le labourage qui restoit, luy laissant son Asne pour ce sujet. Le garçon fit tout comme on luy avoit commandé, puis mena l’Asne paistre en quelques champs, où le Loup, l’ayant trouvé à son avantage, le dévora. Guiharan, voyant cela & n’y pouvant remedier, se prit à crier & forhuer le Loup. Saint Hervé, qui lors estoit en prieres dans l’Oratoire, entendant ce cry, sort dehors, &, informé comme tout s’estoit passé, rentre dedans, redouble sa prière, priant Dieu de ne permettre, à son occasion, ce dommage arrivé à son bon Oncle & Hoste. Comme il prioit ainsi, voilà venu le Loup à grand erre ce que voyant Guiharan crioit au Saint qu’il fermast la porte de la Chapelle sur soy ; mais le Saint luy répondit « Non, non, il ne vient pas pour mal faire, mais pour amender le tort qu’il nous a fait amenez-le, & vous en servez comme vous faisiez de l’Asne,)) ce qu’il fit ; & estoit chose admirable de voir ce Loup vivre en mesme estable avec les Moutons, sans leur mal faire, traîner la charruë, porter les faix & faire tout autre service comme une beste domestique (1).

VIII. Cependant, saint WTpAroëdns fit son message, visita sa sœur, la mère de saint Hervé, & luy fit les recommandations de son fils, ce qui la réjouit grandement, quoy (1) En la vie de St. Malo se lit mesmc miracle, le 15 novembre. – A<