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la logea dans l’église paroissiale. Mais, à la faveur de la nuit, la statue prit sa volée : on la retrouva le lendemain au milieu des ruines, dans une touffe de sureau. Derechef on la transporta au bourg et derechef elle retourna clandestinement à son buisson fleuri. Il fallut l’y laisser et construire, pour l’y abriter, une chapelle toute neuve qui, avec sa rosace trilobée et son riche portail aux arcs en contre-courbe, n’a pas sa rivale dans toute la Cornouaille du nord. La belle dame qui l’habite reçoit, au 15 août et au lundi de Pâques, l’hommage solennel des pèlerins ; mais il lui survient, à certaines nuits, des visites plus mystérieuses : de la chapelle du Relecq, en Léon, une lumière se détache, franchit l’Elorn et pénètre dans la chapelle de la Fontaine-Blanche par la petite porte de la nef. Un instant elle s’arrête devant l’autel, puis continue sa promenade et va se perdre dans les lointains du Ménez-Hom, couronnés par une autre chapelle de Marie.

— C’est la Vierge du Relecq, vous disent les bonnes gens, qui vient rendre visite à ses cousines de Cornouaille !…

Pour le moment, le petit placitre qui s’étend devant la chapelle n’est pas très animé. Il ne s’y voit, avec les trois vendeurs, qu’une vingtaine d’assistants disséminés dans l’ombre des talus et sur les banquettes de la route.

Seiz livr ha dek gwennek ! (Sept livres et dix sous !) répète inlassablement le vendeur de l’arbre, un grand gaillard sec et tanné, qui répond au nom magnifiquement barbare de Gourloüen Cap.

Mais personne ne met de surenchère. L’arbre des âmes, l’arbre sacré de la frairie, payé trente-deux francs l’an passé, va-t-il donc s’adjuger à ce prix dérisoire ? Non ! Une partie des membres de la frairie