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précaution se conçoit, le prétendant ne se souciant guère d’ébruiter son échec, s’il arrivait que son mandataire essuyât un refus. De là le caractère clandestin que celui-ci donne à sa mission.

La demande est-elle agréée cependant ? Le fiancé est introduit près de la fiancée. Tous deux s’assoient à une table avec leurs parents. On pose sur la table une miche de pain blanc et un flacon de dourkérès ou de doursivi (liqueurs spéciales faites avec des cerises ou des fraises) : mais il n’y a pour le couple qu’un seul couteau et qu’un seul verre. Quand le jeune homme et la jeune fille ont rompu le pain et bu au même verre, ils sont unis. Ainsi, autrefois, à la cour du roi Nann, Gyptis épousa Protis. Les Ligures ont précédé les Celtes en Bretagne : ces serviteurs de la Terre-Mère qui, suivant le mot de Camille Jullian, gardaient les traditions immobiles du plus ancien culte universel de l’humanité, ont peut-être légué aux Plougastélois un de leurs rites matrimoniaux. Son transparent symbolisme n’a pas besoin d’explication. L’acte n’a rien perdu avec le temps de sa gravité ; il a la valeur d’un engagement solennel, auquel, de mémoire d’homme, les contractants ne se sont jamais dérobés. Le reste n’est plus qu’une simple formalité.

Mais c’est ici que le cabaretier rentre en scène. Il n’avait jusqu’alors que les ennuis de sa charge : il va en connaître les bénéfices. Sans doute, avant la signature du contrat, les parents des futurs se font une visite de cérémonie. N’entendez point par là

    François Kerdraon. Beaucoup de ces discoureurs plougastélois d’ailleurs, s’aident de répertoires imprimés tels que les Rimou, Discoursiou ha Goulennou évit en Eurenjou publiés à Morlaix et qui ne sont pas à leur usage exclusif.