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comme le coureur de Marathon, en remettant la chère relique à un capitaine du 318e ; ou tel ce Legars, dont Paul Ginisty nous contait la sublime odyssée, qui, lors des dernières attaques sur Château-Thierry, tout nu, sous les feux croisés des Boches, traversait la Marne à la nage pour porter un pli de son commandant, revenait avec la réponse par le même chemin, dans le même équipement sommaire, et s’étonnait sincèrement qu’une action aussi simple eût pu lui valoir la médaille militaire. Et telle encore — pour prendre cette fois un exemple collectif — cette division bretonne de Verdun, engagée le 22 février 1916 et qui peut se vanter d’avoir battu le record de toutes les présences en première ligne. On l’avait peut-être oubliée ou l’on avait fini par croire, comme disait un loustic, qu’elle faisait partie du paysage, car on ne la releva qu’au bout de six mois et quand l’effort allemand était complètement brisé.

Ainsi, à travers l’espace et le temps, la race des Roland, des Guesclin, des Richemont, des La Noue, des Guébriand, des Plélo, des La Tour d’Auvergne, des Cambronne, des Bisson, des Lambert demeure fidèle à son type historique et, la première au feu, elle est aussi, suivant l’expression magnifique d’un de ses chefs, le colonel de Malleray, tombé devant Verdun, « la race qui combat partout la dernière ». Race de granit, qu’aucun choc n’ébranle et, comme ces vieilles pierres grises de sa campagne qu’étoilent des lichens argentés, des orpins d’un rose si tendre, à la fois la plus farouche et la plus douce des races, celle qu’une pudeur invincible retient toujours de parler d’elle et que Shakespeare semble avoir incarnée dans son Troïlus « éloquent par ses actions et sans langue pour les vanter », celle dont un légionnaire de l’Uruguay qui l’avait vue à l’œu-