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pensée de nos cimetières menacés, ne suffirait-il pas de lui faire entendre que nous sommes en Bretagne et que ces cimetières, en somme, ce sont nos vraies églises à nous ?


RÉPONSE DE MAURICE BARRÈS[1]


J’achève de lire, mon cher Le Goffic, la belle lettre que vous m’écrivez dans l’Éclair, pleine d’un sens profond sur le rôle des cimetières en Bretagne, sur le souvenir obscur que votre terre semble garder d’avoir été au fond des âges notre ossuaire national et le caveau où l’on portait les morts de tous les points de la Gaule.

Elle est saisissante, l’interprétation historique que vous nous donnez des champs de repos dans la vieille Armorique. « Tout notre patrimoine artistique ou presque est rassemblé là, me dites-vous : châteaux à eau merveilleux, comme les fontaines à vasques de Saint-Jean-du-Doigt et de Loguivy-lès-Lannion : grands calvaires à figuration dramatique, comme ceux de Tronoën, de Guimiliau, de Guéhenno, de Plougonven, de Plougastel ; chaires à prêcher en plein vent, comme celles de Pleubian et de Plougrescant ; ossuaires magistraux, vastes comme des églises et à la décoration desquels la race semble apporter on ne sait quelle volupté sombre particulièrement sensible dans celui de Saint-Thégonnec : avec ses pignons fleuronnés, ses colonnes de l’ordre

  1. Cette réponse parut dans l’Écho de Paris sous le titre : Églises et cimetières bretons. Elle a été reprise depuis par l’illustre écrivain et reproduite avec quelques variantes dans son livre : la Grande Pitié des églises de France.