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ges, ils sont là comme dans une aire d’où ils s’élancent pour annexer des mondes. Tout ce qu’ils touchent, ils le renouvellent ou le marquent au cachet de leur ardente personnalité ; Broussais fonde la médecine physiologique ; Lamettrie fait de la psychologie une annexe de l’histoire naturelle ; Maupertuis court jusqu’en Laponie mesurer le globe terrestre ; Porcon de la Barbinais ressuscite Régulus ; Boursaint crée l’assistance aux marins. « Ville unique au monde ! pouvait écrire Jules Simon. On fait en un quart d’heure le tour de ses remparts et cependant, rien qu’à parcourir ses rues, on y apprendrait l’histoire de France. »

Les étranges rues ! À peine le guichet de la Grand-Porte franchie, on se sent tout de suite transporté dans une ville à part et comme amphibie, une ville de haut bord, une République de la mer. Tout y est marin, jusqu’à l’escarpement des rues raides comme des haubans, et au clocher de la cathédrale, élancé comme un mât. Nulle autre ville ne possède de ces maisons du XVe siècle dont le pignon en petits carreaux de verre rappelle si étrangement les proues des anciennes galiotes. Et que d’autres bâtisses somptueuses ou bizarres accrochent l’œil au passage ; la Maison d’Argent ; le château des Bigorneaux, ainsi nommé des mollusques lumineux qui, d’après la légende, étoilent sa face à Noël, pendant les douze coups de minuit ; la maison Renaissance à devanture de bois où naquit Duguay-Trouin ; la belle maison Louis XIV d’André Desilles, surnommé « le héros de Nancy » qui, au cours d’une révolte militaire, en 1790, se jeta au devant des canons déjà braqués et fut tué en essayant d’arracher les mèches des mains des servants ; l’Hôtel de France enfin, ancien logis des Chateaubriand et qui conserve dans son état pri-