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tout un délicieux bric à brac du temps de la Renaissance et de la féodalité. L’église Notre-Dame a grand air, quoique composite, mais sa chaire à prêcher extérieure, timbrée d’un écu, tonna pendant toute la Ligue contre les réformés et est entrée par eux dans l’histoire ; le trésor de la sacristie renferme une série d’émaux du célèbre artiste limousin Penicaud. Au pied des remparts coule la Vilaine, fraîche et dorée ici comme une nymphe de Rubens. Et, la Grande-Poterne franchie, voici le faubourg du Rachapt, curieux assemblage de bicoques en tire-bouchon dont les plus biscornues grimpent le long d’une rue à pic où l’on peut voir travailler sur le pas de leurs portes les ouvrières qui se livrent à l’industrie du tricotage à main, une des spécialités vitréennes avec les bagés, qui sont la grande friandise locale. Les aiguilles de buis trottent prestes aux doigts des artisanes, mais les langues vont encore plus vite et les yeux ne chôment point quand passe un étranger.

Se targuant, ni plus ni moins que Rome, d’une origine remontant à la guerre de Troie, Vitré, dont les bourgeois se donnaient du gentilhomme, avait élu pour fondateur Vitruvius, un des compagnons du petit-fils d’Enée, le légendaire Brutus, père putatif des Bretons de la Grande-Bretagne. Vitrivius, est-il besoin de le dire ? n’a jamais existé que dans l’imagination de quelque scribe en mal d’érudition. Le nom de Vitré ne commence d’apparaître que vers la première moitié du xve siècle, avec ce Riwallon d’Auray, qui fut une manière d’Aymerillot bas-breton et à qui le duc Geffroi, pour prix de son zèle à le servir, apanagea un grand fief limitrophe du Maine et de l’Anjou : le Vandelais. Riwallon y bâtit le château de Vitré et prit le titre de baron. Au bout d’une an-