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Mais il faudrait savoir d’abord si ces couleurs se trouvaient dans les originaux bretons et si elles n’ont pas été ajoutées précisément par les adaptateurs étrangers. Je le croirais volontiers et que les auteurs bretons, enclins par tempérament (car nulle race, après la musulmane et la slave, n’est plus fataliste que la race bretonne) à restreindre en toutes choses la part de la responsabilité humaine, ne péchèrent que par un excès de complaisance envers les malheureux amants, plus victimes que coupables, dont la volonté, à les entendre, demeurait aussi étrangère aux égarements de leurs sens qu’elle est absente des égarements de la raison.

M. Bédier a, lui aussi, marqué quelque étonnement que des Celtes aient pu « inventer » la légende de Tristan et d’Yseult, mais son étonnement vient surtout de ce que le conflit douloureux de l’amour et de la loi fait tout le fond de la légende, alors que, dans l’ancienne législation celtique, le mariage était révocable à la volonté des parties. « Peut-elle (cette légende), dit-il, avoir été conçue par un peuple qui a considéré le mariage comme le plus soluble des liens ? » Il y aurait là contradiction et presque incompatibilité, en effet. Mais M. Loth, cette fois encore, a mis les choses au point, et il ne paraît pas que l’union libre ait été un article du code d’Hoël-Da, qui est le Solon des Gallois. La contradiction n’était qu’apparente.

Mais elle montre à quels embarras on se heurte de tous côtés. Il n’est plus de mode sans doute, depuis Michel Bréal, de voir dans l’Iliade et l’Odyssée des œuvres anonymes, filles de la route et du hasard, mais il demeure qu’à passer par tant de bouches et des rhapsodes, qui y introduisaient leurs variantes personnelles, aux diascévastes et aux dior-