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neux de la baie, qu’en termes dignes de Maurice de Guérin et dans la même disposition panthéistique, vous introduisîtes la phrase sur le « va-et-vient admirable de l’héroïque océan breton, mâle et paternel ». Et c’est à Landrellec encore — ou à St-Pol-de-Léon — que les nostalgiques chansons bretonnes imprimées chez ma mère, la Durzunel notamment, cette « sône » incomparable de la tourterelle que nous chantait une fileuse et où s’éplore tout le génie en mineur de la race, vous parurent déterminer la nuance de certains ciels élégiaques auxquels vous ne cessâtes plus de les associer :

« C’était, sur le Bois de Boulogne, le ciel bas et voilé des chansons bretonnes… »

Sur le bois de Boulogne, comme là-bas, en Provence, sur l’étang de Berre, comme sur le plateau lorrain, chez vous, chez cette petite nation aiguisée, prudente et terre-à-terre, qui refuse au voisin de lui prêter son lard, parce que ça s’use, mais qui lui prête volontiers sa femme, parce qu’il n’en coûte rien… Pays abandonné, perdu de désolation, à vous en croire, où l’on est « pressé par des ombres » et sur qui pèse une tristesse immobile dont personne encore ne s’était avisé.

« Pourquoi, demandez-vous, ces déserts me portent-ils des coups si forts et si justes ? Comment ces plaines déshéritées atteignent-elles sûrement mon cœur ? »

Ne faudrait-il pas demander plutôt pourquoi, jusqu’à vous, aucun écrivain de Lorraine n’avait senti la saisissante qualité morale du plateau lorrain ? Je sais bien ce qu’on répond, que je vais chercher bien loin ce que j’ai sous la main, qu’il suffit, pour tout expliquer, que le premier habitat de votre clan ait été ce Mur-de-Barrez, dans le Cantal, qui n’est peut-être