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sion, du sadisme, tout, excepté un sentiment sincère, nu et franc ; il saura qu’il est injuste ; il conviendra de son humeur rebourse :

Mon amour à moi n’aime pas qu’on l’aime…

Mais l’orgueil chez lui aura le dernier mot et, le jour venu de baptiser dans un livre cet étrange commerce sentimental, il l’affublera, par bravade, par dérision, de l’épithète à double sens qui trompa le public et qui lui fit croire, dit Pol Kalig, que les Amours jaunes étaient un recueil de vers libertins.

Le poète avait quitté Roscoff sans esprit de retour. Il avait retrouvé à Paris les artistes qui fréquentaient la pension Le Gad : il n’eut guère le temps ou il dédaigna de se mêler au mouvement littéraire. Cependant il donna quelques vers à la Vie Parisienne de Marcellin, publia son livre et en rêva un autre, qu’il voulait appeler Mirlitons.

Qu’aurait été ce livre ? Une réplique de la première partie des Amours jaunes ? On peut le craindre, d’après les deux pièces qui nous en sont parvenues. Pour nous, le vrai Corbière n’est pas là, malgré les étranges musiques qui y résonnent par moment, si douces et si déchirantes qu’elles font songer à cet oiseau dont parle Renan et qui se sciait le cœur avec une scie en diamant. Le Corbière que nous retiendrons, c’est surtout le Corbière d’Armor et de Gens de Mer, le poète inégal encore, mais puissant et savoureux, sincère jusqu’à la brutalité et soudain d’une infinie tendresse, comme ce canon désaffecté de son Vieux Roscoff dans la gueule duquel s’était logée une candide touffe de jonc marin. Il ne serait pas difficile de montrer que ce Corbière-là n’a pas eu moins d’influence que l’autre sur les directions de la poésie contemporaine et que le