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à crime et où j’ai traité un peu cavalièrement nos Bas-Bretons. Le fait est que j’ai quelquefois estropié leurs noms. Vous souvenez-vous de Mlle de Kerikinili et de M. de Bruquenvert et de M. de Crapado et de M. de Kiriquimi et de M. de Querignisignidi ? Et il est vrai encore que j’ai dit qu’ils aimaient le vin à l’excès et que leurs femmes étaient des sottes de me faire tant de civilités, qui risquaient de laisser croire qu’il n’y avait que moi dans la province, et que les miliciens bretons, quand ils veulent saluer, l’arme leur tombe d’un côté, le chapeau de l’autre, et que les penderies de Bonnets-Bleus m’étaient un rafraîchissement… quoi encore ? Ah ! j’oubliais le plus beau grief. Je vous ai écrit un jour, ma chère enfant : « Je méprise la Bretagne et n’en veux faire que pour la Provence. » M. de Wisme prétend que, si l’on m’élève une statue à Vitré, on y grave cette phrase épouvantable.

Ce que c’est de vous avoir trop aimée !… Il ne s’agissait dans ma lettre que d’une robe de chambre qu’on me voulait faire doubler de couleur feu, à quoi j’ai préféré le taffetas blanc dont la dépense était plus petite et s’accordait mieux avec mon regret de ne point vous avoir auprès de moi. Ne faisiez-vous point toute ma vie ? Pouvais-je trouver quelque douceur à notre séparation ? Je voulais dire tout uniment, et cela s’entendait assez de soi, pourtant, que je n’avais souci de me faire belle qu’aux endroits où vous paraissiez. Et, si vous aviez été en Bretagne au lieu d’être à Grignan, c’est pour le coup que j’aurais choisi la couleur feu et renoncé au taffetas blanc… Que vous dirais-je de plus, ma fille ? En vérité, si je ne savais que M. de Wismes est un écrivain qui honore grandement son pays, je serais près de retirer ce que je vous mandais un autre jour, qu’il y a