Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 4, 1924.djvu/107

Cette page a été validée par deux contributeurs.

qu’il aura pris au sérieux quelque plaisanterie de François Ier, « dont on connaît l’intrépide bravoure ». Sans doute. Pourtant l’attitude des Bretons à cette époque justifiait assez bien les appréhensions du roi, qui, s’il ne craignait point pour lui-même, pouvait craindre pour son beau duché : est-on jamais sur de rien avec ces caboches de granit ?

Et cela mit en goût le cardinal et son secrétaire de pousser une pointe jusque chez ces avale-tout-cru. Ils y furent très courtoisement accueillis. Le comte de Laval et son fils, avec une riche et nombreuse escorte de gentilhommes bretons, vinrent au devant des voyageurs et les menèrent à Rennes où se tenait pour lors le Parlement.

Beatis fut médiocrement ravi, à vrai dire, de la capitale bretonne, dont il trouvait les églises sans beauté, les rues étroites et fangeuses. Chose remarquable, il ne se plaignit point des puces indigènes, qui, au dire de Paul Féval, étaient renommées dès Jules César pour leur grosseur et auraient dû lui rappeler celles de l’Italie, dont il fut si content d’être débarrassé en franchissant les Alpes. Beatis n’en revenait pas de coucher dans des lits sans vermine. Quel secret pouvaient bien avoir ces gens du Nord pour mettre en fuite poux, punaises et puces ? Il s’informa et apprit qu’on badigeonnait « le dessus et le dessous des matelas d’une sorte de mixture » qui avait la double vertu d’être « contraire aux punaises et autres vermines » et de rendre « si agréable la surface des matelas que l’on croyait dormir sur de la fine laine ». Beatis ajoute qu’on n’usait « de ce procédé qu’en été ». Il a oublié malheureusement, si tant est qu’il l’ait sue, de nous livrer la formule de la mixture. Un droguiste qui la retrouverait ferait sa fortune.