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ou quatre numéros, en priant Marguerite de me chanter les pièces auxquelles ils correspondaient. Elle s’exécuta de bonne grâce. Sa voix était un peu aigrelette ; mais ses yeux, tandis qu’elle chantait, regardaient par la croisée, au loin ; sa figure avait pris une noblesse et une gravité singulières. Et, sous ces poutres enfumées, dans ce taudis sordide, c’était bien réellement, comme disait Luzel, le cœur de la Bretagne qui palpitait sur les lèvres grises de la septuagénaire.



    bibliothèques publiques. On peut y lire ces deux notes dictées par Marguerite et dont je respecte le style : « Je sais 259 chansons, tous les tons ; quand on me les citera en breton, je vous les chanterai toutes. Il y a des complaintes, des jolies chansons amusantes, des chansons de noblesse et de cours neuves ; je les sais par mémoire, appris par ma mère ; elle serait été en vie, elle atteindrait l’âge de 102 ans, née à Prielle (sic). Mon père avait le même âge : né à Coatreven l’an 1801. » — « J’ai plus de mémoire maintenant que j’avais la dernière fois, car j’ai mis mon esprit de plus en plus à y songer. J’ai fait une marque rouge quand j’ai copié avant les commencements. » Ajoutons que le père de Marguerite était tailleur. Elle-même était la cadette d’une lignée de deux fils et trois filles. De son mariage avec René Salaün, plus jeune qu’elle de quinze ans, elle a eu deux enfants morts en bas âge.