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Nous n’eussions point demandé tant chez nous pour le flanquer bas et construire à sa place quelque ignoble passerelle de fonte. Mieux inspirés, les Gallois ont conservé leur vieux pont historique ; mais ils ont construit tout à côté un pont moderne, répondant à toutes les nécessités de la vie moderne. Et voilà de ces petits faits qui ne sont point très importants en eux-mêmes et dont la répétition finit par faire éclater le caractère fondamental d’une race.

Nous n’avions qu’à suivre jusqu’à mi-côte, le pont franchi, un petit sentier en lacet qui grimpait au flanc de la montagne voisine, pour aboutir à ce fameux Logan, sorte de roche branlante consacrée par une longue tradition et autour de laquelle le restaurateur officiel du druidisme britannique, feu Myfyr Morganwg, s’avisa, voici plusieurs années, de fonder un sanctuaire en plein vent.

Ce Morganwg (de son vrai nom Ewans Davies) prenait le druidisme au sérieux. Ce n’était pas, comme Hwfa-Môn et ses collègues du Gorsedd, un druide pour rire et de parade. Il avait instauré toute une religion dont il était le grand prêtre et qui comptait, quand il mourut, un assez grand nombre de fidèles. Parmi eux se trouvait le Dr Price, un zélateur, s’il en fut, et qui prêcha d’exemple en commandant que son corps fût brûlé sur le Logan, où il avait déjà fait incinérer son propre fils. On ne dit point que Morganwg, qui rendit sa belle âme à l’Éternel le 23 février 1888, ait poussé jusque-là le respect des traditions ancestrales. Chaque année cependant, au solstice et à l’équinoxe, il reprenait processionnellement avec ses fidèles la route du