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VIEILLES HISTOIRES DE PAYS BRETON

par un clerc du pays de Saint-Michel-en-Grève, depuis qu’elle était devenue la « petite sœur » des Rannou. Dans les autres couplets on énumérait ses crimes. Elle y était représentée comme une fille sans vergogne, comme une création de Satan.

Fille qui siffle et la vipère
Ont toutes deux Satan pour père.

C’est de quoi témoignait sa beauté même, la transparence de ses yeux si clairs, la grâce de tout son corps, mais plus que tout le reste, la couleur étrange de ses cheveux.

Gaïdik Charlès a l’œil pur,
Couleur d’avril, couleur d’azur ;

Gaïdik Charlès est souple et belle
Comme une sainte de chapelle.

On la croirait fille de Dieu
N’était son poil couleur de feu…

Venait alors l’histoire du premier forfait :

Cloarec Rozmar allait être
Avant dix mois ordonné prêtre.

La Charlézenn — forfait premier ! —
Le pendit au long d’un pommier.

En Basse-Bretagne, les légendes poussent robustement comme en leur terroir naturel. Deux ans à peine s’étaient écoulés depuis la mort de Cloarec Rozmar. Et déjà c’était la Charlézenn qui l’avait pendu !… Suivait le deuxième « forfait, terrible à imaginer ».